La Tour Sombre

Certains ont Tolkien, d'autres ont Harry Potter. Moi, ma saga fleuve, c'est La Tour Sombre.


(Petit avant-propos avant de démarrer l'article proprement dit. La Tour Sombre est, pour moi, un roman essentiel. Je ne peux (et ne veux), par conséquent, pas le différencier des sensations que j'ai éprouvé à sa lecture. Soyez donc prévenu, j'ai écarté toute tentative d'objectivité. Je vous livre mes sentiments presque bruts en espérant vous les transmettre au moins en partie).

Tout le monde connaît Stephen King, cet écrivain américain prolifique connu pour ses romans d'horreur et leurs nombreuses adaptations cinématographiques plus ou moins réussies mais il me semble que peu de gens connaissent la Tour Sombre. 

Autant vous le dire tout de suite je ne suis pas un fan de Stephen King. Je dois avouer qu'il écrit bien et qu'il sait très bien camper des personnages complexes et vivants. Non, la vraie difficulté c'est que l'horreur et moi ça fait deux et, pour en rajouter une couche, je ne suis pas non plus adepte des introductions narratives interminables qui sont un peu la patte du maître. D'ailleurs, le seul bouquin de lui que j'ai pu finir était Salem, probablement parce qu'il est plutôt court (pour un Stephen King). Le seul en effet, en dehors des sept tomes de la Tour Sombre.

 ''L'homme en noir fuyait à travers le désert, et le pistolero le poursuivait.''

Cette phrase qui ouvre le premier tome de cette septologie est sans doute l'une des meilleures amorces que j'ai pu lire. Je vous ferait la grâce d'un résumé de l'histoire, je ne serais pas capable de la décrire avec justesse. Disons qu'il s'agit de la quête personnelle d'un homme sur fond de fin du monde. Toute l'histoire tourne autour de cet homme, Roland de Gilead, le pistolero, une sorte de mixte entre un héros d'un film de Sergio Leone et un chevalier de la table ronde. Quelque part entre le roi Arthur et Clint Eastwood. Frodo a sa montagne du destin, Arthur a son Graal, Roland de Gilead a la Tour Sombre. Une quête qui va devenir une obsession.

Cette saga, c'est comme si Stephen King avait voulu faire son Seigneur des Anneaux mais avec la culture américaine (et -je sais que je vais faire hurler certains d'entre vous en disant ça- du talent littéraire). Je vois déjà certains se dire ''Beurk ! Caca la culture américaine'', peut-être mais pas sous la plume de Stephen King qui arrive à magnifier l'image fantasmée de l'ouest sauvage et y mêlant des influences improbables : Tolkien, Moorcock, Kurosawa, le mythe arthurien et des contes pour enfants comme le Magicien d'Oz... Tout ça avec le talent et l'univers de King lui-même. Le résultat est tout bonnement ahurissant. Je n'ai jamais autant frémis, autant rêvé, autant eu de plaisir, autant été malade, autant loupé de stations de métro qu'à cause de ces sept bouquins.

''Cette saga est le Jupiter du système solaire de mon univers'' Stephen King

Cette histoire, elle traînait dans la tête de M. King depuis longtemps mais son importance, sa puissance faisait peur au bonhomme. Ça se comprend.

Le premier tome fut écrit très jeune. Du temps, où il était encore à l'université. Cette histoire peut se lire seule même si elle pose de plus questions qu'elle apporte de réponse et c'est sans doute celle (parmi les sept) qui a le plus de saveur.

Il faudra bien une dizaine d'année avant qu'il ose écrire la suite. Personnellement, lorsque j'ai commencé à lire ce deuxième tome, encore sous le charme du premier, il m'a fallu arrêter. J'ai laissé le livre de côté pendant un an. La différence d'écriture était flagrante, c'était mieux maîtrisé, plus fouillé mais plus dur aussi. Puis j'ai finis par reprendre et je n'ai pas lâché avant d'avoir lu la fin de la saga. Moi qui ai l'habitude de lire plusieurs livres en même temps, j'ai mis mes autres lectures entre parenthèses. Il me fallait finir la Tour Sombre avant de commencer quoique ce soit ça d'autre.

Il paraît qu'il y eut sept ans entre le deuxième et le troisième tome. Les fans étaient furieux de cette attente. Moi, j'eus la chance d'avoir commencé la saga assez tard (à la sortie du 6e tome) pour pouvoir enchaîner immédiatement. L'intrigue s'étoffait sans nous donner les clefs de sa compréhension globale. Une vrai mythologie se créait devant nous, regroupant les monstres des autres livres de l'auteur, leur donnant une vérité, un sens nouveau. Ceux qui ont (re)lu ''ça'' ou ''le fléau'' après la Tour Sombre n'ont pas dû les lire de la même manière. Dans ce deuxième et troisième tome (les Trois Cartes et Terres Perdues), de nouveaux personnages apparaissaient, riches et complexes, mais leur présentation se mêlait à l'histoire rendant le tout extrêmement fluide. La machine de guerre King avançait à bon train.

Le tome 4 (Magie et Cristal) est un flashback merveilleux et attendu. Nous apprenons juste ce qu'il faut sur ce personnage énigme qu'est le Pistolero. Puis vint le tome 5 (les Loups de la Calla) encore une pause sous forme d'hommage au génial réalisateur Akira Kurosawa (dont je vous conseille vivement le visionnage). L'élan est donné pour le saut dans le grand final dans les deux derniers tomes. Malheureusement, si les Chant de Susannah étonne par son rythme et son ton différent, le corps du dernier tome déçoit. Alors qu'il avait mis laissé mûrir les autres tomes des années, les derniers ont sans doute sonné pour King comme une libération. Prématurée sans doute. Heureusement, le dénouement rattrape tout. J'ai lu ça et là qu'il avait déçu. Moi au contraire, il m'a satisfait. Sans avoir pu la prévoir, je l'ai trouvé juste comme si, instinctivement, c'est aussi celle que j'aurais choisi. Exactement la fin qu'il fallait. J'ai fermé ce dernier tome ravi ; soulagé aussi. Sans le regret et la frustration que je connais souvent à la fin des livres qui m'ont plus.

Aujourd'hui encore, la Tour Sombre est l'étalon de mes lectures fantastiques et c'est sans doute à cause de cela que je suis si difficile dans mes lectures. Je n'ai pas encore trouvé de roman qui ait suscité en moi tant de passion.

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3 Commentaires

  • J'ai lu sur tes conseils ton exemplaire du Pistolero, le premier tome de la série, et j'ai été effectivement happé jusqu'à la fin, mais je ne suis pour autant pas enclin à lire la suite. Je préfère finalement que cet univers garde ses mystères pour lui. Il y a aussi une sorte de flemme d'avoir à lire les 6 tomes suivants, car je suis un lecteur des transports en commun, le temps à prévoir pour tout lire m'apparaît comme une contrainte.

    Je te rejoins aussi sur le mariage prétendument contre nature entre une épopée héroïco-fantastique qui pourait rappeler Le Seigneur des Anneaux et l'univers du Far West, il est effectivement très réussi, prenant le meilleur de chaque pour en faire un tout cohérent qui écarte d'emblée l'idée de "pompage".

    Une très bonne lecture que je recommanderais donc avec le reste de la série que je n'ai pas lu et que je ne lirai pas de sitôt razz

    Je précise également que c'était la première fois que je lisais un texte écrit par Stephen King, je n'ai jamais voulu lire ses écrits plus généralement typé horreur/suspens parce que je suppose que ça ne m'intéresserait pas vraiment. Après avoir lu ce roman, je pourrais peut-être reconsidérer ma position si je tombe sur un de ses romans à l'avenir. smile

  • Ta présentation m'a donné l'eau à la bouche, et je passerai sûrement à cette série quand j'en aurai fini avec ma double lecture du trône de fer en anglais et de Zhongguo (Autant dire que j'en ai pour un moment razz)

    Merci !

  • J'ai commencé à lire la tour sombre l'année dernière, poussé par mon frangin qui l'a trouvé super.

    Je suis au 4ème tome, mais j'ai un avis très partagé sur cette histoire. Elle ne m'a pas happé (contrairement au SdA ou à harry potter, ou à bien d'autres). Celle-là, je passe un bon moment quand je la lis, dans le train où je n'ai rien d'autre à faire, mais quand je referme le livre je n'ai pas envie d'y revenir. C'est en soit très singulier, car je déteste ne pas connaître la fin d'une histoire ce qui fait que je termine toujours ce que je lis, même si je ne l'aime pas : je vais juste plus vite si j'ai bien accroché. Donc cette histoire a bien un côté exceptionnel pour moi quand même, mais ce n'est pas son pouvoir d'attraction. Ce serait plutôt l'inverse, son étrange capacité à ne pas me frustrer de ne pas en connaître la fin.

    J'ai essayé de voir ce qui la rendait différente, et c'est sans doute sa construction extrêmement chaotique, à l'image du temps qu'il a fallu à l'auteur pour la réaliser (et des inévitables changements dans sa propre personnalité pendant ce temps-là, ce qui fait écho à son monde "qui a changé" et qui se délite de partout). ça me fait un peu penser au début du SdA où l'on peut trouver très critiquable le choix de l'auteur de nous mettre une intro fleuve qui n'est pas la meilleure partie du bouquin et fait globalement une mauvaise accroche. Dans la tour sombre, il y a le même genre de "maladresse" littéraire : changements brutaux de style d'écriture, ellipses très longues sur des passages qui ne semblent pas à première vue avoir d'importance cruciale, manque de précision sur le but de toute cette quête...
    Par contre je dois bien admettre que c'est diablement bien écrit. Plusieurs fois j'ai été frappé par des enchainements de mots que je n'avais encore jamais vu ailleurs. (bon je l'ai lu en français, donc ça peut aussi être le fait d'un très bon choix de traducteur, je n'ai jamais rien lu d'autre de stephen king)

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