Le droit d'auteur est-il légitime ?

J'ai toujours trouvé qu'il y avait quelque chose d'anormal dans l'idée de pouvoir réserver une idée, mais puisque le concept de propriété intellectuelle découle de la philosophie des Lumières et de la déclaration des Droits de l'Homme, on se demande si on a même le droit de se poser la question de sa légitimité (car le faire ne serait-il pas juste un avatar réactionnaire prônant le retour de valeurs obscurantistes ?... )


Un peu d'histoire

Avant la renaissance et l'invention de l'imprimerie, puisque la reproduction des textes est impossible en série, la plupart des œuvres sont anonymes (et certaines de celles qui ne le sont pas sont en réalité une espèce d'usurpation en attribuant à un auteur unique ce qui est en réalité un ouvrage collectif). La plupart des copistes altèrent volontairement ou non l’œuvre qu'ils perpétuent ce qui fait qu'on ne sait jamais s'il y a vraiment une version d'origine et personne ne s'en préoccupait.

Pour les œuvres non écrites comme par ex sculptures ou tableaux, il était courant d'attribuer au maître la paternité de toute la production de son atelier, alors qu'elle comprenait évidemment en plus de la sienne celle de tous ses apprentis et assistants... d'autant plus nombreux que le maître était de renom.

Pourquoi est-ce que ça a changé ?

Je peux me tromper mais il me semble que la volonté du droit d'auteur découle originellement d'une volonté de s'extraire du système monarchique où tout le pays et ce qu'il produit est sujet de la couronne et asservi au bon vouloir du roi qui attribue ou pas des privilèges d'exploitation. Donc pour pouvoir récupérer le fruit de leur production, les auteurs (au sens large) ont voulu individualiser leur production de sorte à pouvoir faire valoir leur paternité, et ainsi récupérer du fric (l'industrie et la bourgeoisie ont fait bien plus pour faire valeur le droit d'auteur que les artistes tout en prétendant agir surtout pour le bien de ces derniers ).

Considérations philosophiques et théoriques

Le droit d'auteur actuel en France rassemble deux choses : le droit moral (lier l’œuvre à son auteur et à son état d'origine ) et le droit patrimonial (le fric généré par le commerce de l’œuvre ). Le droit moral est inaliénable et perpétuel, alors que l'autre est limité dans le temps et peut être échangé à un tiers (ensuite l’œuvre devient un "bien commun", comprendre que tout le monde peut en faire commerce, après une durée plus ou moins longue mais à tendance de plus en plus longue quand même).

Ceci pose quelques questions : en effet si on considère que le droit moral peut exister en étant inaliénable et perpétuel, c'est qu'il faut que le "perpétuel" existe, car il serait parfaitement trivial d'accorder un droit perpétuel sur une œuvre qui a une durée limitée. Or tout a une durée limitée, non ? Même un texte imprimé peut disparaître, ou finir par devenir inintelligible : pour moi le concept même de perpétuité est assez vide de sens. J'ai l'impression que ça sert plutôt à flatter l'ego du créateur qui s'arroge ainsi un peu du pouvoir créateur divin (seule entité qui pour moi peut théoriquement donner sens au terme de perpétuité). Mais ceci me semble faire perdurer ce qu'il y avait de moins bon dans le paradigme des Lumières en nous enfermant dans un mode de pensée centré sur l'individu plutôt que sur le système dont il n'est qu'un élément.

Le droit patrimonial est plus basique, et s'il est bien compréhensible de tenter de trouver des moyens de rémunérer son labeur, il y aurait toutes sortes de façon autres de le faire. Par ex, dans une société disons "socialiste" l'état pourrait décider que toutes les créations de ses citoyens sont un bien commun de la nation, et les rémunérer en les achetant toutes quelle que soit leur qualité. Libre à lui ensuite de tâcher de rentrer dans ses frais en valorisant les quelques bonnes créations dans le lot, pour éponger les frais d'achat de la majeure partie moyenne. Exemple volontairement à rebrousse poil de l'atmosphère libéraliste actuelle pour bien illustrer qu'il ne serait que le résultat d'une convention, et aucune n'est moins arbitraire qu'une autre. (d'ailleurs ce système là c'est grosso modo le fonctionnement de la science publique, encore en vigueur)

Est-ce qu'on y a gagné à instaurer un droit d'auteur ?

J'aimerais illustrer cette question avec un constat que j'ai toujours trouvé vraiment étrange. Lorsqu'un architecte ou un sculpteur fait son concept et arrive à le vendre à quelqu'un qui le place dans le paysage, il reste propriétaire des droits de reproduction visuelle de son œuvre. On ne peut pas prendre en photo le paysage qui la contient sans lui demander l'autorisation : pourtant lui n'a pas demandé l'autorisation de la population pour modifier le paysage en l'affublant de son œuvre (si elle est belle tant mieux mais... les goûts et les couleurs... ). Les gens qui ont réalisé l’œuvre n'ont pas de droits : si l'auteur ne l'a pas faite lui même, par ex un architecte ne construit pas le bâtiment de ses mains, mais ça peut arriver aussi pour de grandes sculptures réalisées d'après un modèle. L'auteur n'est donc réellement auteur que des documents décrivant l’œuvre, et non pas de l’œuvre elle-même qu'il ne saurait produire lui-même, pourtant il faudra lui demander l'autorisation à lui et non à aucun des autres intervenants (en revanche eux ils écoperont sans doute des responsabilités si l’œuvre a un souci et qu'elle cause des dommages collatéraux ouf ).

Depuis la généralisation des appareils photos et vidéos, ce système de droit de reproduction étant devenu ingérable en pratique, de nombreux pays ont édicté toutes sortes d'exceptions (notamment le fait de pouvoir filmer le paysage dans un film sans rien demander aux "auteurs" des trucs présents dans ce paysage tant qu'ils ne sont pas l'objet du film). Et d'autres sont restés assez inflexibles (comme la France lol ).

Mais je me demande si cela fait progresser l'humanité vers le mieux, si on considère que c'était l'objectif de la philosophie des Lumières, de prétendre qu'un individu puisse être reconnu propriétaire d'une idée ? Car il me semble évident que cette idée ne pourrait pas germer sans le contexte qui l'a créé et au minimum : des tas d'idées précédentes, un langage, un support d'expression. Pourquoi exclure de la propriété tous ces pré-requis ? Pourquoi est-ce qu'on pourrait avoir plus de droits d'auteur sur une partition que sur une démonstration mathématique ?

Bon évidemment tout cela est très orienté, et je plaide personnellement pour le copyleft qui me semble considérablement plus sain et plus humain mais tout commentaire sera bienvenu.

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48 Commentaires

  • Pourtant on a réussi à tenir 28 commentaires sans l'aborder.

  • Et c'est bien pour ça que ça patine, parce que tous les systèmes dont on peut parler ne sont que des moyens au service d'un objectif sociétal. Sans définir quel est cet objectif, je pense que discuter des moyens n'a aucune finalité. En plus il me semble que dès qu'on parle de sentiment d'injustice, c'est déjà les tripes qui parlent et plus la raison, non ? En tout cas pour moi, l'impression d'injustice ne fait jamais suite à une réflexion, elle est clairement intuitive.

  • J'entends et comprends ton point de vue. Le mien, à savoir qu'on s'éloigne trop du sujet initial pour en tirer un débat constructif, est irrévocable. D'ailleurs, ce n'est qu'un point de vue. Et ce n'est que le mien. En ce qui me concerne, la discussion est terminée.

  • Je suis d'accord avec Cathaseris, il faut poser des limites à un débat. La convention à laquelle je me réfère habituellement quand j'aborde un débat sur un sujet particulier, c'est toutes autres choses étant égales. Si ta pensée chemine vers la remise en cause de la propriété privée en général dans la société occidentale, alors je pense le titre de cet essai devrait être changé en conséquence.

    Sur le sujet initial : Le droit d'auteur est légitime parce qu'il a été créé par une loi. Mais je n'ai pas l'impression que c'est cela dont tu voulais parler. Je vais donc exposer mon avis général sur la propriété intellectuelle et le droit d'auteur.

    Je suis pour la propriété intellectuelle dans une optique d'attribution intellectuelle. Nul ne devrait jamais être capable de prétendre qu'il est l'auteur original de la théorie de la relativité générale. Nul ne devrait jamais être capable de prétendre qu'il a composé le morceau "Let it Be" à part Paul McCartney.

    Je suis également pour la propriété intellectuelle dans une optique de droit d'auteur. Un écrivain devrait être rémunéré en fonction de la popularité de ses livres, un musicien en fonction de la popularité de ses chansons, etc... mais cela devrait s'arrêter quand l'auteur meurt. Je ne comprends pas pourquoi la famille d'un artiste mort pourrait continuer à vivre des droits de ses oeuvres jusqu'à 70 ans (!) après sa mort. Cela n'a pas de sens pour moi.

    Pour les brevets (quel que soit le domaine), je trouve ça complètement stupide. Cela part d'une bonne intention, mais au final cela profite aux grands groupes qui peuvent soit breveter eux-mêmes, soit racheter les brevets, voire faire du chantage avec. Les petits inventeurs n'ont aucune chance de s'en tirer seul à part s'ils se font absorber par un groupe dans le meilleur des cas.

  • Je ferais peut-être un autre essai dans ce cas, mais je trouve la limitation très étrange car je vis dans un monde de choses qui sont toutes interdépendantes.

    Sur le sujet initial : Le droit d'auteur est légitime parce qu'il a été créé par une loi.

    veux-tu dire par là que pour toi tout ce qui est légal est légitime ? (par ex dans un régime d'apartheid tu trouverais légitime les restrictions imposées à une partie de la population ? )

    Nul ne devrait jamais être capable de prétendre qu'il est l'auteur original de (...)

    ok, mais pourquoi ?

    Pour les brevets (quel que soit le domaine), je trouve ça complètement stupide.

    Pourtant le brevet fonctionne comme un droit d'auteur diminué puisqu'il dure moins longtemps. Comment détermine-tu que l'un soit nécessaire mais l'autre absurde ? Je suppose que ce n'est pas juste une délimitation à l'art puisque tu disais juste avant que l’attribution intellectuelle marche aussi pour une formule de physique (même si en l’occurrence la paternité du découvreur dans ce cas est une convention sociale car il n'y a aucun droit d'auteur lié à une découverte scientifique).
    Est-ce que tu considère valable le droit d'auteur mais pas la propriété industrielle ?

  • Le Bashar a écrit :

    Je ferais peut-être un autre essai dans ce cas, mais je trouve la limitation très étrange car je vis dans un monde de choses qui sont toutes interdépendantes.

    C'est vrai, mais pourtant cette discussion n'a pas (encore) dérivé vers la physique quantique, qui tente d'expliquer les lois qui régissent cette interdépendance au niveau des quarks. Je pense qu'on peut séparer le monde avec son interdépendance forte et les discussions que l'on peut avoir à son sujet. Le fait que cette discussion soit limitée ne veut pas dire que le monde est limité. D'autre part, nous ne sommes pas ici en mesure de changer quoi que ce soit ni au droit d'auteur, ni à la société occidentale en général, ce qui limite cette discussion à un exercice argumentaire d'exposition d'opinion que l'on peut arbitrairement limiter sans menacer le tissu de la réalité.

    Le Bashar a écrit :

    veux-tu dire par là que pour toi tout ce qui est légal est légitime ? (par ex dans un régime d'apartheid tu trouverais légitime les restrictions imposées à une partie de la population ?)

    Oui, c'est le principe. Peut-être que tu cherchais un autre mot comme "juste". Une loi est forcément légitime sans forcément être juste. Cela ne remet pas en cause ton opinion ou ton argumentaire, c'est juste un pinaillage sur le titre.

    Nul ne devrait jamais être capable de prétendre qu'il est l'auteur original de (...)

    ok, mais pourquoi ?

    Merci pour la question qui me fait m'interroger plus loin. Instinctivement, j'ai ce sentiment que tout ce qui est produit par mon cerveau devrait m'être attribué. Le paradoxe du singe savant veut qu'un singe tapant au hasard sur un clavier pendant une infinité de temps pourrait presque sûrement réécrire l'intégralité des oeuvres de William Shakespeare. Ce dernier a donc réussi le tour de force d'extraire d'un espace infini de possibilités des oeuvres littéraires, cela mérité d'être reconnu, non ? Quoique Skaespeare soit un très mauvais exemple puisqu'il paraîtrait qu'il n'a pas écrit lui-même toutes les oeuvres qui lui sont attribuées.

    L'autre argument pour l'attribution, est qu'il semble absurde de ne pas le faire dans une société qui reconnaît l'individualité. Chaque humain en société porte un nom même dans les sociétés vernaculaires, ce n'est donc pas un pur produit de la société occidentale qui n'a fait que mettre en évidence l'individualité humaine (au détriment du bien général à long terme, on est d'accord). Cette individualité est basée sur le fait que nous sommes conscients que nous sommes conscients. Je suis convaincu que nous sommes naturellement égocentriques parce que nous savons que nous avons un point de vue subjectif sur le monde.

    Est-ce que tu considère valable le droit d'auteur mais pas la propriété industrielle ?

    Exactement. Je considère que les brevets sont un obstacle à l'innovation et à l'optimisation technique en général. Quid de tous ces inventeurs qui n'ont pas pu itérer sur une invention à cause d'un brevet détenu par une grande entreprise ? Ce n'est même pas qu'ils ont tenté leur chance, ils n'ont même pas pu pour des raisons légales !

    C'est différent pour moi d'oeuvres artistiques que je considère comme "finales". Toute variation sur une oeuvre artistique est également une oeuvre artistique finale. Je différencie l'inspiration artistique de l'optimisation de procédés techniques.

  • Dans ce cas tu considère que la légitimité est conditionnée par la force de contrainte qui lui est associée. La loi est légitime tant que la majeure partie du peuple s'y plie, mais cesse de l'être en cas de révolution, c'est bien ça ?

    Si c'est bien ça, alors tout est potentiellement légitime ou illégitime ce qui rend la question initiale triviale.

    Toutefois ce qui donne la légitimité c'est que le plus grand nombre trouve quelque chose assez juste pour l'imposer à l'autre minorité, du coup ma question ne serais pas meilleure si j'avais demandé "le droit d'auteur est-il juste ?" puisqu'en fin de compte tout le monde tentera de répondre à la première question en la comprenant comme la seconde en s'appuyant sur la légitimité donnée par sa force propre, s'il ne reste plus que ça.

    Chaque humain en société porte un nom même dans les sociétés vernaculaires, ce n'est donc pas un pur produit de la société occidentale qui n'a fait que mettre en évidence l'individualité humaine

    En effet, et s'il n'y a pas de droit d'auteur, les sociétés primitives reconnaissent quand même toutes une certaine forme d'attribution aux choses échangées. Ce qui m'amène justement à la suite :
    J'ai l'impression que les différences d'acceptabilité entre les différentes formes de propriétés intellectuelles pourraient être liées aux objectifs poursuivis par l'échange de ces oeuvres, de la même manière qu'on retrouve deux formes d'échanges "économiques" :
    - l'échange-don, dans lequel on reconnaît le créateur initial de ce qui a été donné. En effet ce qui a été donné est considéré comme un morceau de l'auteur. Ce qui motive le donneur est une augmentation de prestige et de renommée, c'est pourquoi il est nécessaire que son nom y reste attaché, mais pas que l'objet soit vendu contre monnaie (même si ça ne l'empêche pas, en général vendre est moins rémunérateur en terme de prestige). Dans le cadre normal de ce type d'échange, celui qui reçoit se sent obligé d'une manière ou d'une autre à faire un contre-don équivalent (donc qui peut être très différent), ce qui rend l'ensemble neutre d'un point de vue "financier" (ou du point de vue des ressources mobilisées).
    - l'échange marchand, dans lequel l'objectif du vendeur est d'augmenter son capital via une plus valu sur l'échange. Il n'a pas besoin de garder la propriété sur ce qu'il vend, au contraire, il doit la céder entièrement pour satisfaire les objectifs de cet échange. Celui qui reçoit efface sa dette de contrepartie par la monnaie dont il se sépare, il considère donc que l'objet de l'échange est totalement sien une fois l'échange effectué (et l'utilisera peut-être lui aussi comme base d'un nouvel échange marchand, ce qui lui serait impossible sans sa pleine propriété).

    Ainsi on dirait qu'ici tout le monde s'accorde sur le fait que ça serait injuste dans le cadre du premier que l'auteur initial soit déconnecté de son produit (considéré comme une extension de lui-même). En revanche une majorité s'accorde aussi sur le fait que ça serait injuste dans le second que l'auteur garde un droit qui continue après l'échange.

    Suis-je (encore) à côté de la plaque ?

    Aussi même si dans le titre initial j'ai marqué "droit d'auteur" je voulais bien parler de la propriété intellectuelle en général, ce qui apparaît clairement dans le premier paragraphe, dont le droit d'auteur n'est qu'un morceau.

    Je pense qu'on est bien dans le sujet pour déterminer où se trouvent les limites qui font que le droit est légitime ou pas. Et la grosse différence que je vois là c'est que dans un cas nous avons un droit qui est attaché à une personne (dans le cadre de l'échange à prestige). Elle n'utilise ses productions que comme vecteur d'un acte de distribution pour augmenter son prestige (ou sa renommée, appelez ça comme vous voudrez). Dans ce cadre, il est effectivement illogique de considérer que son droit puisse être transmis à sa descendance, ou de manière générale, n'ai une durée qui ne soit pas celle de la vie de l'auteur.
    En revanche dans le cas de l'échange marchand le droit est attaché à l'objet. La production est utilisée pour accroitre le capital du producteur, capital précédent la création, qu'il investi dans cette dernière dans l'espoir de la revendre plus cher ensuite. Or ce capital est une propriété, et comme telle, se transmet familialement. Dans ce cadre, il est donc logique que le droit soit transmissible et effectivement transmis, et ai une durée illimitée comme celle des autres propriétés.

    Seulement la bonne blague c'est que cette différence fondamentale dans les objectifs ne se traduit pas par la différenciation simple entre "l'art" qui serait du ressort de l'échange à prestige et "l'industrie" qui serait du ressort de l'échange marchand. On trouve pleins d'exemples d'échange à prestige dans le monde du commerce, et autant d'exemples d'échanges marchands dans celui de l'art. Il y a aussi quelques bizarreries commensales, comme par ex le marchand qui va faire croire que son oeuvre a été produite par une personne renommée, en lui attribuant le prestige d'une oeuvre qu'elle n'a pas faite. Le plus étrange est que dans certains cas les deux partis peuvent être satisfaits : le marchand évidemment parce qu'ainsi il vend plus, mais celui qui recherche le prestige aussi parce qu'ainsi il en obtient plus aussi. (les ex de cette transaction sont légions dans la production littéraire, notamment)

    Par contre je pense qu'on retrouve là ce qui différenciait linux et windows. Le premier n'a pas été créé dans une optique d'échange marchand alors que le second si.

    Certaines lois de droit d'auteur reconnaissent elles-aussi cette différence d'objectif car elles n'accordent pas les droits pour une sculpture ou une oeuvre architecturale si cette dernière est une commande (le droit est alors cédé au propriétaire).

  • De ma faible expérience avec le droit d'auteur, principalement par ma femme qui a fait du travail de graphisme et d'illustration pendant un temps, notamment créer des logos, le droit d'auteur lui-même n'a rien à voir avec le prestige mais plutôt la rémunération des artistes (auxquels doivent être attribuées les oeuvres donc). Au contraire, c'est plutôt un argument employé par les clients d'artistes pour justifier une ristourne. En pratique, les clients d'artistes ne pigent rien au droit d'auteur, la pratique la plus courante est donc de gonfler la facture du travail proprement dit, et d'offrir les droits d'utilisation complets sans limite dans l'espace et dans le temps ; alors que normalement ces droits devraient être facturés séparément, de manière récurrente tant que l'oeuvre est utilisée, et leur montant dépend du travail facturé ajusté selon la couverture médiatique et la couverture géographique choisie par le client.

  • La différence entre prestige et rémunération n'est pas dépendante du choix du "client" s'il y en a un, mais de celui de l'auteur sur ce qui l'a motivé à faire quelque chose. Dans le cas que tu décris de ta femme, on dirait que ces créations étaient purement commerciales, on est donc dans le cas de l'échange marchand.

  • Dans la théorie, non, dans la pratique, certains clients se servent effectivement de l'argument prestige pour obtenir une ristourne, voire carrément du travail gratuit.

  • ça me semble assez normal : on vit dans une société qui a glorifié l'échange marchand en prétendant même carrément pendant longtemps qu'il n'y en avait pas d'autres. Donc tout le monde commence par un cadre d'échange marchand, même ceux qui cherchent en fait du prestige (sauf s'ils on réussi à assurer leur subsistance autrement et peuvent agir en bénévoles). Les "clients" incluent dans leur négociation commerciale tous les moyens envisageables de faire baisser le prix, des fois que le "vendeur" accepte de travailler à l'oeil, pourquoi se priver ? wink

  • Est-ce que ça veut dire que le droit d'auteur est normal du coup ?

    Je reviens aussi sur l'illégitimité :

    Le Bashar a écrit :

    Dans ce cas tu considère que la légitimité est conditionnée par la force de contrainte qui lui est associée. La loi est légitime tant que la majeure partie du peuple s'y plie, mais cesse de l'être en cas de révolution, c'est bien ça ?

    Oui, la légitimité change en fonction des lois qui sont en vigueur. Avant l'adoption de la "loi Taubira", le mariage entre personnes de même sexe était illégitime en France. Ce n'est plus le cas. L'autre utilisation courante d'"illégitime" concerne les rois et leur succession. Certains enfants nés hors-marriage étaient illégitime, ce qui veut dire qu'ils ne pouvaient pas prétendre à la couronne selon les lois de succession en vigueur.

  • Ertaï, je crois que tu confonds légitimité et légalité, qui sont deux notions différentes. La légalité est définie par la loi : il était illégal de se marier pour les couples homosexuels en 2012 ; mais il est légitime que ces couples aient le droit de se marier.
    La légitimité est beaucoup plus subjective que la loi, puisqu'elle dépend de l'opinion des individus. Alors que la légalité est définie par la loi. Ainsi, le Bashar peut demander si le droit d'auteur est légitime alors qu'il est légal.

  • Je comprends parfaitement ce dont vous parlez, mais ce n'est pas la définition actuelle de "légitime" qui est un synonyme de "légal" tel que tu l'énonces, d'où mon interrogation initiale sur la pertinence du titre tel qu'il est écrit.

    D'où tirez-vous votre acception de "légitime" ?

  • Dans les définitions j'ai pour légitime le sens premier qui est effectivement synonyme strict de légal, mais un autre sens qui dit "Qui se justifie, qu’on peut admettre, excuser." et c'est dans ce sens là que je l'utilisais dans notre cas. ça ne se rapporte plus à la loi mais à sa morale ou un raisonnement personnel.

    Pour légitimité, on a "La qualité de ce qui est conforme à la loi, à la justice, à la raison ou aux règles établies." et là c'est encore plus clair, car la justice n'est pas synonyme de la loi, non plus que de la raison. Ces 4 qualités décrite pour ce qui est légitime ne vont pas de pair et on peut donc s'appuyer sur l'une ou l'autre.
    Il y a donc bien la possibilité comme le dit Drago de s'interroger sur la légitimité d'une loi ou d'un droit. (mais sinon, Ertaï, quel mot emploierai tu pour la même chose ? car il faut bien avoir une possibilité de faire ça, non ? )

    Enfin la légitimité est pour moi non pas une question de loi, mais une question de pouvoir. Quand "Certains enfants nés hors-marriage étaient illégitime, ce qui veut dire qu'ils ne pouvaient pas prétendre à la couronne selon les lois de succession en vigueur.", le bâtard peut y prétendre quand même s'il est assez fort pour l'imposer et éradiquer ses adversaires (voir un autre prétendant même pas bâtard). Et c'est de même pour toute loi : qui a assez de pouvoir pour imposer la sienne se superpose à la précédente.
    Dans notre système théoriquement on ne peut plus le faire, on utilise plutôt du fric que des épées dans notre oligarchie parlementaire, mais le résultat c'est le même : le plus puissant impose sa vision de ce qui est juste ou pas. On pourrait me rétorquer que dans le cas des mariages homo ce n'est pas vrai mais en fait si. La majeure partie de la population est pour, et il n'y a aucun puissant lobby financier qui n'ai d'intérêts contraires, donc ça peut se faire.

  • "Le droit d'auteur est-il moral ?"
    "Le droit d'auteur est-il juste ?"
    "Le droit d'auteur est-il efficace pour favoriser la création ?"
    "10 façons d'améliorer le droit d'auteur en France"
    "Un tas de sable s'attaque au droit d'auteur, vous n'allez pas croire ce qui va arriver ensuite"
    "TED Talk : Revoyons le droit d'auteur par Le Bashar"

  • Je n'ai pas très bien compris ce message, et tout particulièrement la dernière phrase ? scratch c'est quoi "TED talk" ?

  • Chacune de ces lignes est un titre alternatif potentiel pour ton article, et ça va dans l'ordre du plus sérieux au plus parodique. Les TED Talks sont des conférences inspirationnelles dont chaque présentation dure 3 minutes maximum.

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