Les wannabe cow-boys français de l'ARPAC

Suite au massacre d'Orlando de Juin 2016, l'éternel débat sur la restriction de l'accès aux armes à feu a été une fois de plus relancé aux Etats-Unis. Ce que je ne savais pas, c'est qu'il existe des partisans du port d'arme en France. Et si les partisans américains ont des arguments, les français n'en ont par contre aucun.


Les détails du massacre

Le 12 Juin 2016, un homme armé est rentré dans la boîte de nuit LGBT Pulse à Orlando, en Floride, aux Etats-Unis après avoir échangé des tirs avec l'agent de sécurité. Commence une prise d'otage qui durera 3 heures aux termes desquelles les forces spéciales américaines ont donné l'assaut, réussissant à abattre le criminel. Le bilan est pour l'instant de 49 morts et de 53 blessés, ce qui rend ce massacre le plus meurtrier aux Etats-Unis depuis le 11 Septembre 2001. L'auteur du massacre était armé d'une carabine automatique et d'un pistolet semi-automatique desquels il était le propriétaire légal car il était lui-même garde de sécurité.

Le classico du débat politique US

Le débat sur le port d'arme n'est pas nouveau, mais les forces en puissance l'ont rendu quasi-immortel. D'un côté, les tueries tristement régulières, l'absence de reconnaissance des maladies mentales par les assurances santé, et des statistiques accablante de dangerosité des armes à feu en-dehors de situations de dangers. De l'autre, le deuxième article de la Constitution américaine, un jugement de la Cour Suprême des Etats-Unis, et un lobby pro-armes en la structure de la NRA (National Rifle Association) capable de financer les campagnes électorales de nombreux députés et sénateurs au niveau des Etats ou même fédéral, et plus généralement une culture américaine de la violence et de l'auto-détermination.

Comme à chaque massacre important, le président des Etats-Unis Barack Obama a fait un discours triste et ferme contre le port d'arme, admettant en filigrane qu'il n'a effectivement pas le pouvoir de mettre en place un contrôle efficace de l'achat d'arme, sans même parler de désarmement de la population civile. Comme à chaque massacre important, toutes les personnalités politiques ont envoyées leurs "thoughts and prayers" (pensées et prières) par Twitter aux familles des victimes. Comme à chaque massacre important, le porte-parole de la NRA a répété que le seul moyen d'empêcher ces tueries de se produire, c'est le "good guy with a gun" (le gentil armé).

Un franchouillard chaud-lapin sauvage apparaît

Si ce débat stérile m'était familier aux Etats-Unis depuis les 4 ans que j'y vis, en revanche je ne m'attendais pas à ce que les mêmes arguments photocopiés soient répétés tels quels en français. Pourtant c'est ce que l'ARPAC, l'Association pour le Rétablissement du Port d'Arme Citoyen déroule à longueur d'articles de blog. Certains articles sont mêmes des traductions directes de publications américaines.

Le principal argument de l'ARPAC est l'auto-défense qui permettrait de faire justice soi-même, mais cela ne résiste pas vraiment à l'analyse statistique. En 2013 aux Etats-Unis, pour environ 250 cas de Justifiable Homicides1 (homicides en situation d'auto-défense), 500 personnes ont été accidentellement tuées par balles, et 20 000 personnes se sont suicidées avec une arme2. Bien sûr, il ne s'agit que des homicides. La statistique plus générale des Defensive Gun Use (utilisation défensive d'une arme à feu) est beaucoup moins précise du fait que cela ne fait pas partie des exigences de reporting de la part des agences de maintien de l'ordre. Le fait reste : l'utilisation d'une arme à feu par un civil pour empêcher un crime d'être commis est plutôt rare, et une arme à feu est toujours dangereuse, que ce soit pour son propriétaire, sa famille ou même ses voisins.

Les Etats-Unis, terreau fertile de violence

Seulement, le débat américain sur le port d'arme est alimenté par bien plus de choses que le simple argument de l'auto-défense, qui ne tient pas la route seul. Les Etats-Unis ont une culture notoirement violente, avec des exemples aussi variés que la popularité de sports comme le hockey sur glace, le football américain, le baseball ou encore le catch, la production régulière de films d'action violent, les dépenses militaires très importantes, ou simplement l'histoire de la création du pays. Entre l'extermination des Amérindiens, la guerre contre l'empire britannique, celle contre le Mexique, celle contre l'Axe, celle contre le Nord Viet Nâm, celle contre l'Irak, celle contre les Talibans en Afghanistan, celle contre l'Irak encore...

D'autre part, la culture américaine et basé sur le principe de l'auto-détermination personnelle, que chacun est censé être capable de s'en sortir par soi-même. Dans ce contexte, être armé en est une conséquence presque logique puisqu'il n'y a de base pas de confiance dans le gouvernement d'assurer la sécurité. Ce manque de confiance culturel dans le gouvernement est particulièrement évident dans le texte de la Constitution des Etats-Unis d'Amérique qui dès l'article 2 mentionne:

A well regulated militia being necessary to the security of a free state, the right of the people to keep and bear arms shall not be infringed.

« Une milice bien organisée étant nécessaire à la sécurité d'un État libre, le droit qu'a le peuple de détenir et de porter des armes ne sera pas transgressé. »

De concert avec la décision District of Columbia v. Heller de la Cour Suprême des Etats-Unis qui établit l'autodéfense comme un composant central du droit, ces deux textes confirment le biais culturel américain de méfiance envers le gouvernement et le droit du port d'armes pour les citoyens à des fins d'auto-défense. Cela explique notamment la difficulté du gouvernement fédéral à passer avec succès des lois de limitation d'accès aux armes, qui doivent passer le test de la Constitution et du Congrès, dont certains membres ont un intérêt financiers par le soutien qu'ils reçoivent de la NRA à voter contre n'importe quelle initiative anti-armes à feu.

A noter que les Etats américains ont une grande latitude pour autoriser ou interdire le port d'arme. Ainsi, l'Etat de New York dans lequel je vis interdit purement et simplement le port d'arme aux civils.

Et les français de l'ARPAC dans tout cela ?

Je vous retourne la question ! J'ai ainsi appris que le port d'arme, jusque là réservé aux nobles, a été autorisé à la Révolution afin de la maintenir, et ce jusqu'à 1939 où l'État français craignait une insurrection intérieure à la veille d'un conflit avec l'Allemagne qui semblait inévitable. Depuis, seul le port d'arme sportif (chasse, tir sportif) est autorisé aux civils en France.

La France n'est pas un grand pays avec des grands espaces difficiles à couvrir par la police locale ou nationale justifiant l'auto-défense, n'a pas d'article de Constitution garantissant un droit au port d'arme, n'a pas vraiment une culture de violence ni de problème avec des tueries régulières. Bref, j'ai bien peur que l'ARPAC n'obtienne jamais gain de cause, quoique vocaux soient ses membres sur Twitter après chaque tuerie, en France ou bien sûr aux Etats-Unis.

Un dernier point sur l'argument de l'auto-défense

Dans le cas de la tuerie d'Orlando comme dans celle survenue au Bataclan à Paris en France le 13 Novembre 2015, l'argument pour le port d'armes est le suivant : si une proportion non précisée des fêtards avait été armée, le ou les tueurs auraient pu être abattus plus rapidement, évitant ainsi un lourd bilan meurtrier. Cet argument est difficile à réfuter tel quel parce qu'il est plausible même s'il refait le match, et surtout il confie instantanément des armes à gens qui n'en ont pour la plupart jamais touché une de leur vie.

Mais même si un civil armé avait improbablement pu stopper les tueurs dans ces deux cas-là, il est assez malhonnête d'ignorer par ailleurs la dangerosité générale des armes même en-dehors de situation d'affrontement. Ainsi, parmi la centaine de victimes d'Orlando qui auraient été magiquement épargnées par leur supposée rapide réaction armée à l'irruption du tueur dans la boîte de nuit, il n'est pas improbable qu'un ou deux d'entre eux n'ait même pas été en mesure d'être là ce soir-là à cause de son arme à feu, soit par accident, soit par un suicide facilité par la mortalité des armes à feu.

Alors autant la mort aux mains d'un type esseulé ayant l'intention de tuer est triste mais difficilement évitable sans empiéter tout un tas de droits fondamentaux, mais la mort par accident ou suicide est selon moi beaucoup plus triste, car dans ces deux cas il est possible de les prévenir par la simple interdiction du port ou de la détention d'armes, ce qui est majoritairement le cas en France, même si les chasseurs nous rappellent toujours bon an mal an que les armes à feu, même récréatives, tuent des gens qui n'avaient rien demandé.

Sources

1: FBI - Crime in the United States 2013

2: CDC - National Vital Statistics Reports - Deaths: Final Data for 2013, page 41

(Bannière et vignette extraites de « Non-Violence - The Knotted Gun - United Nations » par Alan English sur Flickr, sous licence Creative Commons non-commerciale.)

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13 Commentaires

  • Le tag "WTF" me semble effectivement approprié DoubleAccentCirconflexe

    Je ne connaissais pas l’existence d'une telle organisation en France. Dans ma Savoie profonde c'est effectivement le chasseur de sanglier plutôt que le déséquilibré ou l'islamiste que je redoute le plus. ouf

  • Bon article, très instructif.

    Tu sembles présenter le suicide par arme à feu comme une des raisons de ne pas être pour leur prolifération et j'aimerais bien que tu développes ton point de vue la dessus.

  • A propos du suicide, je lis sur cette publication de la Direction de la Recherche des Etudes et de l'Evaluation Statistique que le taux de récidive de tentative de suicide était d'environ 27% tous sexes confondus en 2006. Même si le taux peut paraître important, moi je vois plutôt les 73% de gens qui ont tenté de se suicider, ont survécu et ne retentent plus jamais, ce qui indique pour moi une faible volonté de vouloir effectivement se supprimer.

    La grande mortalité des armes à feu ne permet par contre pas de distinguer le cas où la personne en détresse veut simplement lancer un appel à l'aide ou le cas où elle est résolue à se suicider. La faible chance de survivre un suicide par arme à feu signifie que des personnes qui ne voulaient pas forcément arrêter de vivre ne pourront pas se rendre compte qu'elles avaient juste besoin d'un peu d'aide.

  • J'avais lu une explication différente sur la question des armes, venant d'un survivaliste qui parlait de son expérience dans les balkans pendant la dernière guerre.

    Il disait que l'interdiction de port d'arme pour les citoyens est une mesure de préservation du pouvoir par ce dernier, puisqu'elle rend la population inapte à se révolter efficacement en insurrection armée contre l'armée officielle. Cette vision me semble intéressante, car elle donne un éclairage aux situations diverses :
    - aux USA, l'existence du pays lui-même n'a pu se faire que suite à l'insurrection armée contre la puissance coloniale. ça semble assez logique de garder un attachement fondamental à ça même longtemps après que les raisons en aient disparu.
    - en france, les autorisation/interdictions suivent précisément les différents épisodes insurrections et le rétablissement d'un pouvoir fort.
    - en suisse, l'organisation de l'armée elle-même comme une milice a choisi la possession d'arme de guerre chez des particuliers, dans une optique de défense nationale. Évidemment, les craintes d’insurrection populaire intra-suisse ont été négligeables dans son histoire par rapport aux invasions étrangères ce qui justifie sans doute cette posture et l'absence de crainte du gouvernement que ça ne se retourne contre lui.

    Pour moi ce n'est pas la possession ou interdiction d'armes qui est significative, c'est l'état d'esprit de la population. Ainsi être armé, pour un français actuel ne servirait à rien dans une optique de défense puisqu'il vit depuis si longtemps dans un climat policé qu'il ne vit pas sur ses gardes. Il ne part pas du principe qu'il se fera peut-être tirer dessus en allant faire ses courses, et donc n'est pas dans l'état de vigilance nécessaire pour réagir si c'est effectivement cas. D'ailleurs comme il ne fait même plus de service militaire, il n'a même plus de moyen de savoir à quoi ressemble vraiment une fusillade. Sa réaction la plus probable est donc la stupeur.

    Le témoignage du survivant à la guerre civile des balkans concluait qu'être armé d'un fusil est un impératif de survie dans une situation de guerre civile, et qu'aucune autre arme ne tient la comparaison. (mais il identifiait aussi comme nécessité celle d'avoir des amis, et des connaissances utiles à troquer. Pouvoir être armé pour survivre dès le départ aux bandits-pillards qui surgissent en l'absence de police est juste le préalable)

  • Je me rends compte maintenant que je suis totalement passé à côté de cet argument quand j'ai mentionné le second article de la Constitution des Etats-Unis, qui est précisément ce à quoi tu fait allusion. Merci pour le développement de ce point-là.

  • J'ai l'impression aussi qu'au USA, ça traduit finalement la faible confiance des habitants dans le pouvoir fédéral. Comme s'ils avaient toujours peur que ce dernier ne devienne un pouvoir étranger, colonial, comme celui de l'empire britannique de leur histoire (?).

    Vue de france c'est facile de ne pas le voir, parce que pour nous le président américain c'est comme notre président à nous, on oublie facilement que les gouverneurs américains sont aussi des chefs d'états, et pas des espèces de présidents de région.

    J'ai vu un truc sur la prévention des violences routières et ça m'a fait penser à ça aussi. Ce qui évite les accidents ce n'est pas l'outil (la qualité de la voiture), c'est la vigilance des conducteurs. Pour les armes personnelles c'est pareil, être armé ça ne sert à rien pour se défendre si on ne s'attend pas à devoir le faire. Pour moi ça explique pourquoi le nombre de défenses réussies est si faible. Dans une optique de défense, mieux vaudrait prendre des cours d'observation que d'acheter un flingue.

  • J'ai l'impression aussi qu'au USA, ça traduit finalement la faible confiance des habitants dans le pouvoir fédéral.

    Je ne sais pas si tu fais l'erreur sciemment, mais c'est beaucoup plus profond que cela aux USA. Dans tous les pays du monde les habitants ne font pas confiance à leur gouvernement à des degrés plus ou moins forts.

    La particularité des USA, telle que je la vois, c'est que ceux qui ont rédigé la Constitution ne se faisaient eux-mêmes pas confiance pour gouverner, ce qui est quand même carrément différent. Les "pères fondateurs" auraient tout à fait pu omettre cet article et entretenir une armée régulière pour repousser une éventuelle nouvelle attaque des Anglais, mais cet article est clairement un désaveu du gouvernement qui serait mis en place suite à la rédaction de cette constitution, et à tous ceux qui lui suivraient. L'histoire leur donne tort jusque là, aucune milice populaire n'a été nécessaire au maintien de la liberté des Etats, même lors de la Guerre de Sécession qui s'est principalement déroulée entre des armées régulières, et les Confédérés qui avaient le plus l'habitude de porter des armes en temps de paix n'ont pas fait le poids face à l'industrie et au nombre déployé par les Unionistes.

    Mais le sentiment reste, et est beaucoup plus profond que juste un manque de confiance de la population envers le gouvernement: même morts, même pour une mauvaise raison historique que tu as explicitée, les fondateurs du pays non plus ne font pas non plus confiance au gouvernement actuel, quel qu'il soit. C'est très différent de la Constitution de la 5ème République par exemple qui fait confiance au président de la République française pour gouverner plutôt qu'au peuple français.

  • Ouaip mais bon, la police et l'armée c'est deux trucs bien distinct. En occurrence c'est bien "des ennemis de l'intérieur" dont il est question. Pourtant ce ne sont pas les polices qui manquent, entre le shérif (qui est une sorte de maire adjoint armé), la police du compté, la police d'état et enfin le FBI c'est quand même étrange que les habitants ressentent encore le besoin de protection. Ou alors il faut vraiment revoir le plan d'urbanisme ouf

    ps : je viens seulement de comprendre l'image de la bannière confused

  • Quand tu es dans des agglomérations urbaines, c'est clair que tu as forcément des policiers à proximité. Mais les Etats-Unis ne sont pas que des agglomérations tentaculaires. Dans la plupart des états (même l'État de New-York !), entre ces agglomérations, tu as des superficies vierges ou presque de tout urbanisme qui peuvent atteindre celle de la France. Si tu as la chance d'avoir de la réception téléphonique au milieu de ces endroits (ce qui n'est pas gagné), tu peux attendre un bail que les policiers les plus proches arrivent si tu as un souci.

    Ce phénomène qui remonte finalement à la colonisation de l'Ouest, lors de laquelle les colons se défendaient eux-mêmes contre les animaux sauvages (coyotes, puma, ours), les hors-la-loi et éventuellement les Amérindiens, se retrouve dans la géographie actuelle des opinions pro/anti armes : les pro-armes sont concentrés dans les États ruraux de l'Ouest, tandis que les États traditionnellement urbanisés du Nord-Est sont principalement anti-armes.

  • Pourtant si on prend la russie, pour un contexte similaire aux USA : surface vierge énorme, super-état d'états très divers, fondements coloniaux... ils n'ont pas une législation qui promeut le port d'armes.

    ertaï a écrit :

    L'histoire leur donne tort jusque là, aucune milice populaire n'a été nécessaire au maintien de la liberté des Etats, même lors de la Guerre de Sécession qui s'est principalement déroulée entre des armées régulières, et les Confédérés qui avaient le plus l'habitude de porter des armes en temps de paix n'ont pas fait le poids face à l'industrie et au nombre déployé par les Unionistes.

    Je ne sais pas ce que tu appelle une milice populaire, parce que pour autant que je sache, dans la guerre de sécession les deux armées en présence étaient essentiellement constituées de milices. L'essentiel du front Ouest s'est déroulé entre des bandes armées non régulières dès le départ, et sur le front Est à partir de la déroute confédérée à gettysburg, la majeure partie des troupes du sud étaient effectivement des miliciens sans matériel, formation ou uniforme réglementaire (et sans salaires) se battants sur leurs sols contre un envahisseur, ce qui pour moi est clairement la définition d'une milice. Les sympathies pro ou anti armes sont-elles corrélées avec les anciens états confédérés ?

    ertaï a écrit :

    Dans tous les pays du monde les habitants ne font pas confiance à leur gouvernement à des degrés plus ou moins forts.

    Ce que je voulais dire, c'est que j'ai l'impression qu'aux USA la population a doutes sur les institutions elles-mêmes, alors qu'en france par ex, même si beaucoup de gens se défient des personnes dans les gouvernements, ils ne remettent pas en cause l'institution elle-même. Comme si ce n'était pas les fondements du système de gouvernement qui était pourri, mais seulement les gens qui sont dedans en ce moment. Comme s'il suffisait de les remplacer pour que tout aille mieux. Les régions ne militent pas pour que l'état leur lâche la grappe, mais plutôt pour qu'il soit plus présent (enfin, surtout son fric). Alors qu'aux USA j'ai la sensation qu'une part importante de la population serait satisfaite que les prérogatives fédérales soient réduites à presque rien, voir à un simple décorum, et tout spécialement les états les plus riches qui verraient bien cesser de subventionner les plus pauvres.

    Enfin bon je ne sais pas si tout cela affecte la question du port d'arme. Les arguments de l'auto-défense ne tiennent pas devant les faits, du coup que reste-t-il ?
    Pour les usa, la simple résistance au changement peut suffire à expliquer la défense du port d'arme, envers et contre tout argument logique (en tout cas à mon avis). Mais en france ? J'ai donc regardé ce qu'il y a sur la page de l'arpac : http://arpac.eu/pourquoi-le-port-darme

    On y trouve dans l'ordre :
    1- défiance envers la légitimité de l'état à posséder l'usage exclusif de la force
    2- féminisme (défense physique des femmes contre les violences masculines)
    3- défiance envers la capacité de l'état à assurer la protection des citoyens (et qui contient une justification par l'absurde avec une lien vers le fait que des gens pro de la self-défense à main nue se sont fait avoir par surprise -> ils n'ont pas dû capter que ça illustre au contraire le fait qu'armés ou pas, ils se seraient fait surprendre tout pareil, et que c'est bien la vigilance que les aurait sauvé, et non pas l'armement. Mais bon, quand on va dans un bar ou une boîte de nuit, c'est pas pour y rester vigilant... )
    4- psychose sécuritaire (pas sûr que ça soit différent des points 1 et 3)
    5- encore défiance envers l'état
    6- idem
    7- amalgame entre "liberté" et "droit de rendre justice soi-même"

    Donc qu'est-ce qui les anime vraiment ? La crainte de n'être pas protégé par l'état. L'impression que la justice est injuste et inefficace, et que les citoyens seuls feraient mieux. L'idée que certains être humains sont des êtres au-delà de toute rédemption qui doivent être éliminés, que c'est aussi naturel qu'inévitable. Et un net besoin de se réapproprier le pouvoir qui apparaît comme "confisqué".

    Human Ktulu a écrit :

    c'est quand même étrange que les habitants ressentent encore le besoin de protection.

    Pourquoi est-ce étrange ? Qu'il y ai plein de policiers n'est pas forcément rassurant. Pour être rassuré, il faut expérimenter dans sa vie, une absence de risques et ainsi se sentir sauf. Perso, vu les tâches que semblent être nos policiers, je ne me sens pas du tout rassuré quand il y en a, et bien au contraire, je préfère les fuir. Des abrutis serviles avec des flingues, ça ne me rassure pas du tout. A chaque fois que j'ai eu besoin d'eux, ils n'étaient pas là, en revanche, ils m'ont toujours fait chier pour des âneries insignifiantes (genre quand j'étais gosse de rouler sur le trottoir en vélo que c'est pas bien, même si à cet endroit la route était très dangereuse, ou plus tard que mon symbole "A" de conducteur n'était pas réglementaires etc. ce genre de conneries). Du coup quand dernièrement mon maire a sérieusement envisagé d'armer les flics municipaux (qui ont l'air encore plus glands que les autres) j'ai été sincèrement horrifié. C'est triste pour notre police, mais vu ses agissements, je n'ai vraiment aucune confiance en elle (ce qui ne me fait pas oublier pour autant que sans elle il y aurait des bandits de grand chemin qui détrousseraient les gens en faisant des barrages sur les routes).

    A côté de ça, je semble me sentir bien plus en sécurité que mes voisins, alors même qu'ils ont des murs, des serrures, qu'ils s'enferment chez eux, qu'ils ont des alarmes, des vitres anti-effraction et encore je ne sais quel dispositif coûteux. Ils ont été cambriolés une ou plusieurs fois. Moi pas. J'imagine que ce n'est pas étranger au fait que précisément je n'ai pas un haut mur qui protège de la vue de la rue le voleur au travail, que je ne pars pas régulièrement en vacance à l'autre bout du pays et que l'allure extérieure peu soignée et pauvre de ma maison doit faire supposer un intérieur à l'avenant (à juste titre). Ou alors c'est juste une espèce de guigne intersidérale qui vient frapper seulement ceux qui ont peur. Peut-être que le fait de posséder une TV et d'y regarder les infos agit comme une antenne à emmerde. Faudrait faire des stats roll

    Quoi qu'il en soit pour moi pour se sentir en sécurité la plus important n'est pas les outils (serrures, alarmes, flingues) mais les amis et les bonnes relations de voisinage. Le témoignage du survivant des balkans me conforte dans cette idée quand il dit que ceux qui survivent le plus longtemps, c'est pas ceux qui sont ultraentrainés et seuls, mais ceux qui agissent en collectif. L'expert armé seul, il faut bien qu'il dorme et quand c'est le cas, son flingue ne lui sert plus à rien. Toute la question c'est d'avoir quelqu'un capable d'être vigilant à ta place quand toi tu ne peux pas l'être.

  • Le Bashar a écrit :

    Pourtant si on prend la russie, pour un contexte similaire aux USA : surface vierge énorme, super-état d'états très divers, fondements coloniaux... ils n'ont pas une législation qui promeut le port d'armes.

    Je ne connais pas du tout la législation russe en matière de port d'arme, mais si j'en juge par les photos de profil sur les sites de rencontre russes, la possession d'armes est clairement un marqueur de statut social. Dans le même genre, une des chaînes Youtube de démonstration d'armes à feu les plus populaires est russe.

    Le Bashar a écrit :

    Les sympathies pro ou anti armes sont-elles corrélées avec les anciens états confédérés ?

    Clairement oui. Je n'ai pas trouvé de carte montrant la corrélation directe, mais cett infographie sur les lois de régulation des armes à feu aux Etats-Unis éditée par The Guardian en 2015 permet d'un coup d'oeil de voir les sympathies législatives pour la possession et le port d'armes : les États du Sud-Est et du Moyen-Ouest ont pas ou peu de lois restreignant la possession ou le port d'armes, tandis que les États du Nord-Est, la Californie et l'Illinois ont des lois très restrictives.

    Le Bashar a écrit :

    Alors qu'aux USA j'ai la sensation qu'une part importante de la population serait satisfaite que les prérogatives fédérales soient réduites à presque rien, voir à un simple décorum, et tout spécialement les états les plus riches qui verraient bien cesser de subventionner les plus pauvres.

    C'était peut-être vrai surtout dans les déclarations des hommes politiques, principalement républicains, avant les catastrophes naturelles qui se sont produites aux Etats-Unis à partir de 2012. L'ouragan Katrina, les inondations au Texas et l'ouragan Sandy par exemple ont donné lieu à des plaidoyers larmoyants et hypocrites pour que l'Etat fédéral intervienne via la FEMA (Federal Emergency Management Agency), l'Agence Fédérale de Gestion de Crise.

    A côté de ça Ted Cruz (un sénateur US du Texas), un des récents candidats déçus aux primaires républicaines était prêt à faire fermer l'IRS (Internal Revenue Service), l'équivalent américain du Trésor français, le Département du Commerce, le Département de l'Éducation, le Département de l'Énergie, le Département du Logement et de l'Urbanisme et le Bureau de Protection Financière du Consommateur (créé après la crise de 2008). Cela paraît bizarre vu de France si on oublie que ces institutions sont généralement en doublon de celles des États.

  • Vendredi a l'occasion d'une soirée j'ai retrouvé des vieux potes, dont plusieurs ont bossés aux states dernièrement et effectivement ils ont été surpris que dans certains endroits tel que le Texas porter une arme est aussi naturel que d'avoir un frigo ou une voiture. Ce qui avait le plus surpris mon collègue, c'est que son contact désigne son 9mm comme "non-létal" ouf
    Et sa fille a tuer son premier gibier à 12 ans, le papa en est très fier.

    Par contre il a également assisté a une scène que l'on ne verrait sans doute pas en france, une simple manifestation musicale composés d'Afro-Américains uniquement. Mon pote qui était avec sa copine c'est dit "tiens c'est sympa leur musique je vais voir", mais quand il a commencer à voir qu'on le regardait bizarrement et que les rares "Blancs" qui passe dans le coin ont fuis en courant, ben il a changé d'avis. perplexe

    @Bashar : tu m'a fait rire pour le cambriolage, mon père est pareil ouf

  • Je ne connais pas du tout la législation russe en matière de port d'arme, mais si j'en juge par les photos de profil sur les sites de rencontre russes, la possession d'armes est clairement un marqueur de statut social. Dans le même genre, une des chaînes Youtube de démonstration d'armes à feu les plus populaires est russe.

    Le port d'arme est restreint, mais pas la possession. J'avoue que je connais pas les détails. Je ne les connais même pas en france d'ailleurs (je sais juste par ex qu'on a le droit de posséder un sabre, mais pas de se balader dans la rue avec s'il n'est pas empaqueté d'une manière qui empêche qu'on s'en serve).

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