Lumière sur : Al-Qaida au Maghreb islamique

Al-Qaida au Maghreb islamique, ou AQMI, est un groupe terroriste qui a fait parler de lui par de récents kidnapping. Regardons de plus près.


Les Évènements récents

Il y a eu ces derniers mois des évènements dont on a beaucoup parlé à la télévision. Je veux parler des enlèvements qui ont eu lieu ces derniers mois autour du Sahara, entre cet humanitaire Français d'un certain âge (Michel Germaneau, 78 ans) qui a été exécuté par le groupe terroriste qui se fait appelé Al-Qaida au Maghreb islamique (AQMI), et ces employés d'Areva enlevés par la même organisation terroriste (terroriste pour nous évidemment, eux ne se voient pas de cette façon je pense).

Ces enlèvements par Al-Qaida de Français ou d'autres nationalités ne sont pas les premiers. D'autres ont eu lieu auparavant, moins médiatisés, en 2009 et 2010. Des européens principalement, que ce soient des Britanniques, des Espagnols ou des Français. Pourtant, ces enlèvements répétés signifient pour beaucoup la fin de l'âge d'or d'AQMI. Pour comprendre cela, il faut revenir en arrière.

Avant AQMI : le GSPC

AQMI est un nom récent, qui date de 2007, il a remplacé celui de Groupe Salafiste pour la Prédication et le Combat (GSPC).

Le GSPC a été fondé en 1998 par Hassan Hattab pendant la guerre civile algérienne, en opposition au gouvernement algérien. Le groupe comptait entre 300 et 800 combattants (chiffres tirés de Wikipedia). Sa cible était avant tout internationale : la France et la Mauritanie. La lutte est féroce et des attentats sont tentés en France même, tout en refusant la trêve proposée par le gouvernement algérien.

2004 marque une évolution puisque le GSPC étend son réseau de recrutement pour la guerre en Irak. Des maghrébins principalement, ainsi que quelques Espagnols et Français, se battent pour Al-Qaida là-bas. Le risque est grand de voir ces gens revenir en Europe pour y implanter une nébuleuse terroriste au sein même des territoires occidentaux. Pourtant, le GSPC essuie plusieurs revers et compte de nombreuses pertes au fil des années.

L'année 2006 est marquée par de nombreux combats et attentats suicides au Maroc, et à Tunis même, c'est le début de l'apogée du groupe. De nombreux terroristes offrent leur vie pour tuer et détruire au nom du djihad.

Zone d'action du GSPC en 2006-2007. Image tirée de Wikipedia.

2007 : l'âge d'or

Les relations avec Al-Qaida, renforcées pendant la guerre en Irak, a permis au GSPC de changer de nom et de porter le "label" Al-Qaida. Ainsi, avec le soutien de Ben Laden, le GSPC est devenu en janvier 2007 Al-Qaida au Maghreb Islamique.

Et 2007 va devenir l'âge d'or d'AQMI, qui va revendiquer des attentats meurtriers et audacieux. Sont notamment ciblés le siège du gouvernement algérien, un cortège du président Bouteflika, le Conseil constitutionnel, le siège algérien du HCR (programme de l'ONU), frappant Alger et Casablanca à plusieurs reprises. Les menaces précises d'AQMI mènent à l'annulation du Paris-Dakar.

Pourtant, la fin de l'année 2007 est parallèlement marquée par des morts importantes au niveau de l'organisation, signifiant le début du déclin d'AQMI. La lutte menée par les Français et les Algériens (armées et services secrets) portent leurs fruits après des années de collaboration. Parallèlement, au Sahara les Touaregs rejettent également l'organisation en leur faisant la guerre.

2008-2010 : le déclin

L'organisation, subissant de plus en plus de revers, avec des effectifs de plus en plus réduits, est contrainte de déplacer son théâtre d'opération. AQMI se déplace du nord vers le sud, s'enfonçant profondément vers le Sahara. Parallèlement, le nombre de ses nouvelles recrues diminue de plus en plus. Obama n'y est pas étranger non plus, avec sa politique de la main tendue de nombreux musulmans se sont demandé l'intérêt de davantage de conflit armé contre un président d'origine musulmane.

La recrudescence des enlèvements, pour beaucoup des humanitaires (cibles faciles car désarmées), signifie qu'AQMI a besoin d'argent rapidement. De fait, des groupuscules cherchant de l'argent facile kidnappent les ressortissants étrangers, et AQMI les achète (compter 1500 euros par otage, c'est donc extrêmement lucratif !), avant d'exiger des rançons. Internet permet d'amplifier la voix du groupe. Acculé dans le désert, le noyau dur compterait aujourd'hui environ 200 combattants armés, auxquels il faut ajouter les sympathisants.

Pourtant, il faudra encore compter sur AQMI pendant encore longtemps. Le désert de sable offre une bonne protection, et les Touaregs ne sont plus aussi hostiles qu'auparavant envers l'organisation. Les jeunes notamment, qui se sentent pauvres face à la clinquante société occidentale, n'écoutent plus vraiment la voix de leur parents et sont tentés par l'argent facile proposé par AQMI, en échange d'otages. Al-Qaida pourrait y trouver une intéressante source de recrutement pendant longtemps.

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10 Commentaires

  • Merci sur cet éclairage géopolitique, c'est toujours un plaisir de lire ce genre de textes concis qui résume bien certains des points les plus obscurs de la géopolitique moyen-orientale smile

    En tout cas, je ne savais pas que ça rapportait autant de kidnapper, il y a là un véritable business qui s'est créé, c'est horriblement fascinant.

  • Alqaida est une organisation imaginaire créée pour entretenir la peur et justifier les mesures ultra sécuritaires...

  • J'ose espérer que c'est ironique.

    Dans le cas contraire, où sont les preuves ? ( d'une chose que je considère comme hautement improbable.)

  • Il faut distinguer deux choses : le nom Al-Qaida, et les terroristes qui organisent attentats et rapts. Les terroristes existent, c'est un fait, les journaux ne se lassent pas de nous relater avec exactitude le nombre de victimes faites par chaque nouvelle explosion. Pour Al-Qaida, c'est un nom d'organisation terroriste dont Oussama Ben Laden est l'une des figures emblématique mais qui a été un peu galvaudé au fil du temps. Depuis les spectaculaires attentats du 11 Septembre 2001 revendiqués par cette organisation (que ce soit le cas ou pas, clin d'oeil à nos amis partisans du complot), ce nom a été sur-utilisé notamment par les communiqués américains dans de nombreuses attentats qui ont suivi.

    On a ainsi pu très souvent pu entendre cette petite phrase "Les autorités s'orientent sur la piste d'Al-Qaida" ou bien "La piste Al-Qaida n'est pas écartée", ce qui a associé de près ou de loin cette organisation à de nombreux attentats dont elle n'était pas forcément le commanditaire ou l'exécutant. De ce fait, je suppose que des groupuscules terroristes indépendant ont pu vouloir titrer parti de cette notoriété en faisant passer leurs actions comme étant du fait d'Al-Qaida. Tout cela fait qu'Al-Qaida est perçue comme une énorme organisation tentaculaire capable de frapper n'importe où n'importe quand, et même à plusieurs endroits à la fois. C'est qu'elle est sûrement, mais pas dans de telles proportions.

    Il y a des liens financiers établis entre la famille Ben Laden et de grandes institutions financières occidentales, les camps d'entraînement existent, les ceintures d'explosifs aussi. Mais à mon avis l'absence de gros coups d'éclats semblable au 11 Septembre 2001 attribués clairement à cette organisation terroriste depuis cette date montre pour moi que la puissance de cette organisation est surtout psychologique, ce qui est finalement la définition d'une organisation terroriste, soit l'emploi de la terreur à des fins politiques.

    Alors si superdjidane, Al-Qiada existe bel et bien, mais je te rejoins sur un point : justifier des mesures sécuritaires à cause d'une menace quelconque d'une organisation terroriste, c'est rentrer dans leur jeu, c'est abdiquer le rapport de force instauré par ces organisations, c'est qu'ils ont déjà gagné, et ce n'est pas une bonne nouvelle.

  • Al-Qaida, une invention ? Ouaf ouaf ouaf !

    Je ne sais pas si des organisations terroristes se sont faits passer pour Al-Qaida alors qu'elles ne l'étaient pas. Techniquement, il faut avoir l'aval du chef, Ben Laden, je suppose, sinon quelle crédibilité pourrait avoir ce groupe ?

    Et je suppose qu'il faut des conditions préalables pour avoir l'autorisation de s'appeler Al-Qaida.

  • Je ne pense pas non plus que des groupes se soient fait passer formellement pour Al-Qaida, mais comme je l'ai écrit, ils ont pu employer des modes opératoires similaires pour que le nom d'Al-Qaida apparaisse lors de l'enquête.

  • Dragoris a écrit :

    Et je suppose qu'il faut des conditions préalables pour avoir l'autorisation de s'appeler Al-Qaida.

    On attend avec impatience un procès ou règlement de compte entre organisations terroristes pour usurpation d'identité et infraction à la propriété intellectuelle. sourire

  • Comme il a été dit la prise d'otage c'est de l'argent facile (les politiques payent la rançon pour booster leur popularité avant une élection). Du coup il y a un vrai business, avec des cours à la hausse et à la baisse, comme dans une vraie capitale boursière. L'argent sert à acheter des armes (c'est cher), à alimenter des réseaux dormants...

    Mais le mot "terroriste" est assez poreux, parmi tout l'argent qui se négocie autour des otages occidentaux il est facile d'imaginer que certains sont plus attirés par des commissions juteuses que par un glorieux sacrifice pour perpétuer le Djihad.

    Toutefois je ne pense pas que l'on puisse nier qu'il existe bel et bien des gens déterminés à mettre à mal le système économique et politique occidental, par tous les moyens, y compris en manipulant des âmes égarées qui se  condamnent pour tuer des innocents.

    Pour l'instant leur seul véritable succès c'est le renversement du résultat des élections espagnoles après l'attentat de Madrid. Pour ma part j'ai l'impression que la présence établie de la communauté d'origine musulmane en Europe fait beaucoup plus (politiquement et pour le progrès des droits civiques et de l'égalité des chances) que toutes les bombes humaines qui ne font du bruit que dans les médias.

  • Dragoris a écrit :

    Al-Qaida, une invention ? Ouaf ouaf ouaf !

    Couché Médor ! sourire

  • Haaa Sbire je l'attendais celle-là sourire

    Ertaï, de ce que je sais Al-Qaida n'a pas le monopole d'une seule façon de faire, les enlèvements ou les attentats sont en fait plutôt similaires. Lorsqu'un rapt a été signalé, on attend au moins de savoir s'il y a revendication. Il n'y a qu'une seule fois à ma connaissance où on a fait passer un attentat comme étant d'une organisation différente de celle de l'auteur, et il s'agissait des attentats de Madrid, où l'on disait que c'était l'ETA et non Al-Qaida (mais aujourd'hui on sait que c'est l'inverse.

    SpiceGuid, à mon avis les élections ont été chamboulées davantage à cause du mensonge proféré par le gouvernement ("Ce n'est pas Al-Qaida, c'est l'ETA !) alors qu'on était qu'à un mois ou deux des élections. Le gouvernement a essayé de ralentir l'enquête démontrant que c'était Al-Qaida la cause, mais le mensonge était vraiment trop gros et ça n'a pas été apprécié.

    Je pense que tu sous-estimes la capacité des gens à avoir peur. Je n'oublie pas que Sarkozy a réussi à gagner les élections à travers sa campagne sur la sécurité, celle des banlieues et des jeunes délinquants qu'il fallait à tout prix empêcher de déranger les honnêtes gens. Ici, même topo avec le terrorisme. Quand on voit Hortefeux nous déblatérer ses bêtises... Genre "La bombe était à 17 minutes d'exploser" alors que les services des autres pays s'étonnent de cette déclaration. C'est avec ça que Sarkozy compte se faire réélire (ou son successeur, bien qu'à mon avis il va se représenter). Les gens s'inquiètent qu'il y ait de plus en plus de musulmans en France, peur injustifiée j'en suis certain, mais les Français ne sont pas intelligents, ça se saurait (et puis on a le président que l'on mérite, hein).

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