Brisby et le secret de N.I.M.H.

Synopsis

C'est l'époque de la moisson, tout les animaux des champs se préparent au Grand déménagement pour éviter de finir sous les roues de la charrue. Mais madame Brisby, petite souris de son état, a d'autres soucis. Son mari, Jonathan, vient de succomber à une attaque du chat de la ferme et comme si cela ne suffisait pas, un de ses souriceau est très malade, une pneumonie lui diagnostiques-t-on ! Impossible alors dans son état de bouger du parpaing où la famille a élu domicile... en plein milieu du champ !
Mme Brisby engage alors, bravement, une course contre la montre face au tracteur pour sauver famille et foyer. Cette quête l'amènera à rencontrer les étranges rats du rosier sauvage et à découvrir qui était réellement son mari.


Analyse détaillée

 Madame Brisby : le courage

 La première chose que l'on constate en regardant ce personnage c'est le flagrant contraste avec les autres personnages principaux. Mme Brisby ne porte pas de prénom, est vêtue d'une simple cape en lambeau, sait à peine lire grâce à son mari, ne fait pas preuve d'un intellect brillant ou de capacité hors du commun.
 Mme Brisby n'est qu'une petite souris des champs miséreuse et anonyme comme beaucoup d'autres. Les prédateurs, la charrue, les endroits sombres et dangereux, les humains effrayent au plus haut point cette petite boule de poils.
Mais ce que les autres n'ont pas, c'est son courage. A l'instar du semi-homme Frodon qui contre toute attente s'avère être le seul à pouvoir sauver le monde, c'est la petite souris qui parviendra à sauver TOUTE sa famille face à un danger qui paraissait insurmontable tout en permettant aux êtres qui lui sont si supérieurs en tout de sortir de leurs moribondes querelles pour enfin évoluer vers leur âge d'or.
Loin d'être une folle de guerre, c'est avec une peur viscérale qu'elle brave la mort dans l'unique but de permettre à sa famille de continuer à vivre. Assaillir un tracteur en marche, demander conseil au Grand Hiboux mangeur de souris, aller chercher secours auprès des énigmatiques rats, affronter le chat Dragon meurtrier de son mari, autant d'épreuve que tout les autres animaux des champs auraient renoncé à accomplir quitte à sacrifier l'une de leur progéniture.
Mais pas Mme Brisby, son amour pour ses enfants est plus fort que toutes les peurs et l'on peut apercevoir toute sa tendresse dans l'unique chanson du film (Flying Dreams Lullaby, merveilleusement interprété dans la version française) alors qu'elle soigne son Thimothé souffrant.
 Une icône de courage qui se verra récompensé à la fin des évènements alors que tout semblait perdu.
 
 

Les rats de N.I.M.H. : les élus à double visage

 L'autre élément qui constitue toute la partie mystérieuse et même fantastique du film est bien sûr les rats de N.I.M.H.
 N.I.M.H. est l'acronyme de National Institute of Mental Health, organisme qui existe véritablement aux États-unis. Dans le film, cet institut nous est dépeint comme menant des expériences douteuses sur la manipulation génétique et testé sur des souris et des rats, montrant au passage le sort cruel réservé aux animaux de laboratoire.
Comble de l'ironie, les expériences seront une réussite totale voire au-delà des espérances mais "le miracle ne fut pas dévoilé aux savants". Mettant à profit leur nouvelle intelligence, les cobayes s'évadent avec succès (mais non sans perte) et se réfugient dans le rosier sauvage d'une ferme.
Les rats de N.I.M.H. (ainsi que les deux souris survivantes) sont des êtres exceptionnels, illuminés par rapport à leurs homologues sauvages. Après leur mutation, ils ont su lire, actionner des mécanismes, réfléchir à des plans, fabriquer des vêtements et autre, construire une base souterraine à l'insu des humains, mettre en place une société, un gouvernement, même s'imaginer un futur radieux. Certains ont même développés des capacités que même les humains considèrerais comme surnaturelles !
Il semble qu'en fait les manipulations génétiques aient eu pour effet de transmettre toute les possibilités des hommes dans ces rats. Ainsi ils sont doués de morale, trouvant indigne de devoir voler l'électricité au fermier alors que c'est un élément vital pour leur survie, poussant certains d'entre eux à imaginer un plan pour devenir autonome, ne les forçant plus à flouer d'autres pour leur propre intérêt. D'un autre côté, certains développe un attrait pour le pouvoir voire le sang. Le plan ne plait pas à tous, qui voient dans leur "société de consommation" un avantage et un confort certain. Le changement fait peur, l'inconnu aussi.
Ainsi malgré toute la puissance dont ils ont hérités, les rats subissent les mêmes travers que les hommes, certain cherche à l'utiliser au mieux, d'autres voient une domination certaine par rapport aux espèces, poussant l'arrogance à même défier les Hommes s'il le fallait. Discours démagogique, ambition démesurée, complots, meurtre tout ceci fait aussi parti de l'héritage légué aux rats de N.I.M.H.
 
 

Don Bluth : l'anti-Disney

Le moins que l'on puisse dire, c'est que le réalisateur a eu la volonté de trancher avec les univers bucoliques et enchanteurs des films de Disney qu'il a lui même très bien connu pour y avoir travaillé.
Don Bluth n'a pas peur de malmener son public : le film est sombre, parfois écarlate ou noir lors des scènes intenses, parfois lumineux lors des scènes féériques. Finit l'édulcoration : la mort rôde et peut frapper à tout moment, les atrocités existent, les combats font rage dans la boue, les personnages peuvent saigner et/ou mourir. Je crois que c'est d'ailleurs le seul dessin animé où j'ai vu le méchant principal périr d'un coup de poignard dans le dos, ironiquement lancé par un de ses complices qu'il avait blessé à mort.
L'animation est de très bonne facture, tendant à reproduire le plus fidèlement des mouvements réalistes. On sent que les animateurs se sont donnés à fond dans ce projet porté quasi à bout de bras et fabriqué presque dans le garage de la maison de Bluth.
Certaines scènes sont tout simplement dantesques. Brisby part à l'assaut d'un tracteur en pleine course dans une atmosphère rouge sang rappelant qu'à tout moment elle peut finir découpée sous la charrue ou tuée par le fermier. Idem lors de l'attaque du chat Dragon ou du combat finale à l'épée.
L'exploration du rosier, avec toutes ses épines et ses chaires qui bougent, est faite dans une obscurité oppressante avant d'être contre-balancée par une lumière féérique lorsque les rats allumeront toutes les ampoules grâce au pouvoir de l'électricité. Soulignant tant la majesté que la puissance de cette société souterraine.
 La visite chez le Grand Hiboux a tout de la visite au cimetière avec son ambiance fantomatique et son ossuaire à souris. N'importe quel enfant à au moins tremblé lorsque l'immense nocturne fait pivoter sa tête sur son axe de 180° du haut vers le bas dans un écœurant bruit de nuque brisé.
Vers la fin du film, tout n'est plus que boue, pluie et noirceur. Cette ambiance est là pour marquer le fait que les plans du méchant Jenner sont en passe d'entraîner la société des rats de N.I.M.H. dans la boue justement.
L'une des scènes clé lors de l'explication sur ce qu'est N.I.M.H. est tout bonnement hallucinante. Les rats subissent des injections qui transforment petits à petits leurs gènes, cette transformation est dépeinte de manière abstraite dans une séquence tout bonnement apocalyptique induisant toute la douleur de cette épreuve.
La dernière scène commence par une épreuve des plus choquantes psychologiquement, la famille de Brisby ayant finalement périt enterré vivant sous des montagnes de boue et cette dernière ayant faillit subir le même dans un effort aussi désespéré qu'inutile de les sauver. Et puis alors que toute le monde se retrouve désemparé de tristesse, le miracle se produit. C'est néanmoins au prix de brûlures graves au mains que l'héritage mystique de Nicodemus fait œuvre et sauve famille et logis dans une explosion d'or. Cette illumination dorée est aussi la manière dont conclut la plupart de ses œuvres l'un des autres grand maître du cinéma d'animation, Miyazaki !
 
 

Aller plus loin

 Don Bluth

Don Bluth est un animateur et réalisateur qui a au début de sa carrière officié chez Disney, notamment sur la Belle au bois dormant. Il se trouve que le projet Brisby a d'abord été présenté tel quel aux studios Disney mais ces derniers rejetèrent la proposition, jugeant le sujet trop dur et trop risqué financièrement.
 Furieux, Don Bluth quitta les lieux et provoqua un schisme énorme aux seins des studios, emportant avec lui tout les animateurs désireux d'enfin faire des œuvres un peu plus mâtures, retardant d'un an la production de Rox et Rouky. Le film en salle fera un honnête score sans plus, se révélant plus porteur une fois sur le marché de vidéo. Néanmoins le film retint l'attention de Steven Spielberg qui décidé d'aider la jeune société de Bluth en produisant son métrage suivant : Fievel et le nouveau monde.
Depuis Bluth c'est fait remarqué par nombre de longs métrages tout aussi adultes et poignant qu'injustement boudés par le public. Brisby, Fievel et le nouveau monde, Le petit dinosaure et la vallée des merveilles, Charlie mon héros, Rock'O'Rico, Pousselina ou encore Anastasia tout ces chefs-d'œuvres méconnus sont de lui.
 Un des pionniers et des héros de l'animation plus adulte.

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31 Commentaires

  • Aaaaaah, Don Bluth sourire

    Je le connais bien pour avoir vu Fievel et le Nouveau Monde et l'avoir apprécié bien plus que beaucoup d'autres productions Disney. J'en garde le gimmick "Jamais dire jamais" énoncé par le goéland sourire

    Je suis content d'apprendre que le succès de ce film-ci a permis à Don Bluth d'obtenir des investisseurs pour produire de nouveau films, du coup je vais sans doute essayer de le regarder un de ces quatres smile

  • J'ai prévu de faire un article sur Fievel également smile
    Néanmoins ce ne sera pas le prochain, pour le suivant je compte vous parler d'un film de Disney méconnu (et oui ça existe).

  • Je me rappelle l'avoir vu mais j'étais petit et bien que je me souviennes avoir bien aimé, j'avais pas tout compris. Ce petit post me donne envie de le revoir.

  • Pareil pour moi.
    Je l'ai vu quand j'étais petit, surtout vers la fin, il y a des passages dans le film qui m'étaient incompréhensible vu mon âge.
    J'avais apprécié le combat entre le méchant et son sbire, mais par contre j'étais un peu choqué de voir du sang coulé au terme de cette lutte.

  • Whaaaa mais c'est pareil pour moi. Il y a une scène qui m'a marqué lorsque j'étais enfant, c'était les yeux rouges qui apparaissaient dans le sombre cactus lol.

    Sinon, j'ai également vu Fievel et le nouveau monde (mais que je n'ai pas trop apprécié lorsque j'étais petit, mais je n'aime pas cette partie de l'histoire américaine de toute façon).
    Le petit dinosaure est vraiment un excellent dessin animé, j'ai dû le voir plus de vingt ou trente fois étant petit lol, mais je crois que la suite est vraiment moins bien.
    Rock'O'Rico je ne l'ai vu qu'une fois, mais j'ai vraiment adoré.

    Mais évidemment, j'étais vraiment très petit pour m'en souvenir réellement.
    Mais moi je ne les trouve pas méconnus ces dessins animés. En particulier Le petit dinosaure.

  • Mais, finalement, tout le monde à part moi l'a vue, ce dessin animé ! eek
    Pourquoi pas se faire une petite projection sur Paris ? smile

  • Quoi, le petit dinosaure, avec petit pied eek et l'autre là, le ptéranodon, et le petit tricératops fille... Et le mou...
    'PAUUUUM' *redevient un enfant*
    Ça fait drôle. Ça doit faire 12 ans que j'ai plus vu ce dessin animé.
    Don Bluth Rule!

  • Je n'ai jamais vu celui-ci mais Fievel, le Petit dinosaure et Anastasia font partie de mes dessins animés cultes smile
    Il faudrait que je prenne le temps de le regarder pouce

  • Dragoris a écrit :

    Mais moi je ne les trouve pas méconnus ces dessins animés. En particulier Le petit dinosaure.

    Effectivement le "Petit dinosaure" est probablement le plus connu des films de Don Bluth surtout lorsque l'on constate la dizaine de séquelle qu'il a donné (malheureusement de qualité très inférieure au film originel frown ). Néanmoins il est un fait que les films de don Bluth sont quand même bien moins connus du grand public que ceux de Disney.

    Ertaï a écrit :

    Pourquoi pas se faire une petite projection sur Paris ?

    Ben malheureusement je n'ai plus la cassette entre les mains donc confused
    Tient une petite anecdote, si vous avez regardé le titre du roman originel vous avez sûrement noté une différence entre les noms. Et bien il s'avère qu'un problème de droit sur le nom "frisby" ou plus exactement "frisbee" (oui oui le disque volant lui-même) a contraint Don Bluth a devoir changer le nom du personnage principal.
    Et comme un malheur arrive toujours au plus mauvais moment, c'est à la fin de la production que les ayants droits de "Frisbee" se sont fait savoir. Du coup comme l'enregistrement des voix était déjà achevé et qu'il n'était plus possible de faire revenir tout le casting pour redoubler, Bluth a dû refaire toute la bande son en transformant les "f" en "b" pour donner le fameux "Brisby" que tout le monde connaît.

  • TSG a écrit :

    Le petit dinosaure, je m'en souviens presque plus. Je me rappelle que la chanson m'avait marqué, et j'ai un bref souvenir d'une scène ou il y a des bulles et de la boue, ou du pétrole, je sais plus.

    Il n'y a pas de chanson dans le premier film du Petit Dinosaure si ma mémoire ne me joue pas des tours. En revanche il y a une douce mélopée avec un chœur qui est le thème principal du film. Et il y aussi effectivement une scène où les petits dinos se frottent à une marre de goudron (et qui permet de sauve Cera des deux carnivores qui voulaient la dévorer)

    TSG a écrit :

    Brisby et le secret de Nimh, je viens de le voir sur Youtube, en VO. C'était très sympa, même si ma connaissance réduite de l'anglais m'a pas permit de saisir le génie de tous les dialogues.

    Si tu as la volonté je te conseilles de trouver la V.F. qui te permettra de mieux appréhender le film c'est clair. Et aussi parce que pour une fois je trouve que la V.F. est plus "puissante" que la V.O. du point de vue du jeu des acteurs.

    TSG a écrit :

    omg, c'était pas un chien le héros? Avec son copain chien-saucisse qui portait une casquette rouge et un tee-shirt bleu?
    C'est aussi une dessin-animé que j'ai vu étant plus jeune, auquel j'ai rien compris, et dont je ne me souviens presque plus.

    C'est exactement celui-là smile

    TSG a écrit :

    De mémoire, il y a un autre dessin-animé comme ça que j'avais bien aimé, mais beaucoup moins... et bien... intéressant, dirons-nous, c'était sur Tom & Jerry, ou ils parlaient, et voulaient sauver une petite fille, mais je me souviens de rien de plus.

    Il s'agit de Tom & Jerry : le film
    J'ai bien aimé ce film d'ailleurs, certes il est loin d'être aussi poussé qu'un Don Bluth mais au moins c'est une bonne source de distraction et finalement on en demande pas plus quelque part smile

  • c'est le film ou tom et jerry parlent et aident une fille aux cheveux blonds à retrouver son père et à échapper à son horrible tante figgs! eek

  • Lui-même. Pour vous servir. smile

  • tu sais que... je l'ai en cassette et que... mon frère de 6 ans l'a regardé cet aprem'? eek
    D'ailleurs c'était un de mes films préférés

  • Heu doucement tout ça. Je vous rappelles à toutes fins utiles que les propriétaires du site/forum sont responsables du contenu de ces derniers. Donc si jamais la police à trouver AG pour ses contenus warez, cela voudrait dire qu'il peuvent envoyer Ivaldir en prison plus amende pour piratage.
    Et c'est pareil en ce qui concerne la diffamation.
    Donc si vous voulez le faire, libre à vous mais que cela reste à votre seule discrétion. wink
    Merci de votre compréhension.

  • Non le film est toujours disponible en DVD. On peut encore facilement le trouver wink

  • (En effet, j'ai un ami qui l'a en DVD!)

    Un film culte! L'un des seuls film (avec Willow) que j'avais en VHS étant petite, et que je regardais inlassablement en boucle... Un scénario magique (que je pense avoir percuté, même à l'époque, cela dit).

    smile

  • Je crois avoir vu tous les films que tu as cité quand j'étais enfant, et je soupçonne mon père d'y être pour qqch. Les réalisations de Don Bluth ayant toujours un regard critique sur des éléments de notre société et mon père appréciant énormément de tels "écrivains" (il est notamment mordu de Bilal et Jodorowsky), il est fort possible que je lui ai servi de prétexte pour les avoir dans sa vidéothèque.

    J'ai d'excellent souvenir de tous ces films, même si je trouve dommage que la plupart des suites (celles du petit dinosaure, ou celle de charlie par exemple) ne soient pas tout à fait à la hauteur. Après je suis peut être un peu difficile.

    Super critique en tout cas DoubleAccentCirconflexe

  • Il en effet très déplorable que les diverses suites données aux films de Don Bluth n'arrivent pas du tout à la cheville de leurs ainés et de loin.

    Rien que l'OAV qui fait office de suite à Brisby est particulièrement navrante et creuse par rapport à toute la richesse du film.

    Mais bon ce n'est pas vraiment un problème lié à Don Bluth, Disney aussi l'a fait et pour des résultats équivalents. Toutes ces sorties direct-to-video n'ont eu qu'une pensée marketing derrière plutôt que la volonté d'être artistique ou provoquants. Hélas.

  • Bonjour à tous,

    Avant toute chose, je tiens à féliciter Aka Guymelef pour cette très brillante analyse de Brisby.

    Maintenant, je me présente brièvement : inscrit au club des trentenaires dans une semaine, je suis actuellement régisseur en région parisienne. J'ai moi-même été ébloui dans mon enfance par les chefs d'oeuvre de Don Bluth, même si je l'avais oublié pour un temps, et aujourd'hui, je voudrais rendre hommage à cet artiste comme il se doit.

    Je suis en train de monter un événementiel concernant les différents travaux de ce monsieur. Cela fait quelques mois que je rassemble des données en ce sens : images, tarifs des reproductions, coût des droits d'auteur, budget pour la projection d'un film, salle où aura lieu l'événement...

    Etant donné que ce forum accueille plein d'amateurs qui s'y connaissent bien, j'ai une question à vous poser, question qui pourrait être le "point final" de cette exposition/projection :

    Don Bluth a été influencé par ses années de travail chez Disney, c'est sûr. Mais y a-t-il eu des réalisateurs plus jeunes qui reconnaissent avoir été eux-mêmes influencés par Don Bluth ? Si oui, savez-vous lesquels ?

    Si vous voulez plus d'informations sur mon projet, je pourrai vous en parler davantage. En attendant, merci par avance de votre attention, et à bientôt peut-être.

  • Wow, j'ai du le voir à 5 ans ce film la ! Que de souvenir !

    Bin tient, j'te met une bonne note.

  • Salut SPX et bienvenue sur le Refuge ! smile

    Pour ta question, je ne savais même pas qu'il y avait des jeunes réalisateurs de dessins animés, alors des qui se réclament de Don Bluth... nuts

  • Bonjour SPX et merci pour les compliments. Malheureusement non je ne peux pas répondre à cette question car je suis loin d'être calé sur les réalisateurs et les rapides recherches que je viens de faire sur le net ne sont pas concluantes.

    De toutes façon les gens ne connaissent plus de noms de réalisateurs de dessins animés (cf la remarque d'Ertaï) donc plutôt que de nommer des personnes je citerais plus les films dans la veine des travaux de Bluth, à savoir une animation adulte avec des titres comme la ferme des animaux ou Felidae. Même s'il est fallacieux de lier ces œuvres à Don Bluth, je pense que sans ses travaux cela aurait pris beaucoup plus de temps pour produire ce genre d'œuvre dans les pays occidentaux.

  • Okay, merci de votre accueil et de votre réponse rapide.

    Pas grave, ça me donne déjà quand même quelques pistes à creuser.

    Je vous tiendrai au courant quand j'aurai du concret à vous donner (genre une date, un lieu...)

  • Salut à tous !

    Juste un petit mot pour vous dire que j'ai progressé dans mon projet. J'ai peut-être trouvé une salle où accueillir mon événementiel expo/Fievel. Je ne manquerai pas de vous tenir au courant dès qu'il y aura du nouveau.

    Bonnes vacances à tous !

  • L'exposition d'SPX a finalement vu le jour !

    Allez le féliciter et si vous êtes dans le coin de Créteil, n'hésitez pas à passer smile

  • Ouais, bonne idée d'avoir ouvert un nouveau post, ça rendra les choses plus claires.

    Hier, c'était la dernière séance de Brisby à Créteil. Nouveau succès (en fait, je crois qu'il a fait autant d'entrées que Fievel avec deux fois moins de séances, je publierai les résultats définitifs sur le post sur l'exposition même). Et à l'issue de la séance, il y a une mère de famille anonyme qui a soulevé une idée qui m'a semblé suffisamment intéressante pour la mettre ici, sur le post consacré à Brisby.

    Attention, je préviens encore les modérateurs. Cette idée peut être sujette à polémiques, et je comprendrai très bien que ce post soit rapidement supprimé et sans suite. Là, encore, je n'ai pas du tout l'intention d'être insultant envers quiconque, et je m'excuse à l'avance si ça vous contrarie.

    La dame a dit : "il y a quelque chose qui m'a gêné, c'est le sexisme qu'on voit à de nombreuses reprises dans ce film". Surpris, je lui demande de développer, et voici les éléments qu'elle juge sexistes :

    - On voit rapidement que tous les personnages ayant un tant soit peu de pouvoir sont des hommes. Aucune femme ne dirige. Ce jusqu’au sein de la famille : il n’y a plus d’homme adulte, mais sur les quatre enfants, si on ne compte pas le petit dernier qui est malade, c’est le grand frère qui est courageux, prend des initiatives quand la maison menace de sombrer, alors que les deux filles ne font qu’appeler leur maman à l’aide.

    - Vraiment, il n’y a que les hommes qui ont le beau rôle. Le Grand Hibou détient la sagesse, les Rats sont menés par Nicodémus, M. Ages est un docteur. Le corbeau s’impose aussi, même s’il est contrebalancé à 50/50 par la Tatie Musaraigne.

    - La société des Rats est pareillement exclusivement masculine. En plus, ce sont les Rats qui envoient Mme Brisby se faire sacrifier pour qu’elle aille droguer la pâtée du chat, ce qui la mène directement en cage.

    Si les modérateurs l'autorisent, je vous invite à donner votre avis, dans le respect des règles de conduite du forum, évidemment. Et une fois que vous aurez parlé, je vous donnerai mon propre avis (qui alimentera de toute façon un chapitre de mon projet de livre sur Don Bluth - je vous avais dit que ce serait mon deuxième projet de livre de recherches ?)

  • Amusant, ce commentaire arrive alors que je viens juste de suivre une conférence sur le sexisme dans la littérature enfantine. Une conférence plutôt bien faite qui m'a permis de voir les choses d'une façon différente.

    En y réfléchissant, je dois bien avouer que le film s'appuie sur des stéréotypes. Même si Brisby est le personnage que l'on suit et que c'est son nom qui apparaît dans le titre du film certaines choses dénotent. En le revoyant récemment, j'avais déjà été surpris par la grande importance d'un personnage que l'on ne voit jamais : le défunt mari de Brisby. Ce dernier est même présenté au début comme le vrai héros de l'histoire par Nicodemus. J'ai le sentiment que jusqu'à la fin la pauvre Brisby n'arrive pas à se défaire de son ombre, du poids de son veuvage.

    Spoiler (Sélectionnez le texte dans le cadre pointillé pour le faire apparaître)

    Je m'attendais d'ailleurs à ce qu'à la fin elle commence une relation avec Justin ce qui n'arrivera pas.

    De plus, son rôle se cantonne à celui d'une "mère courage". La force d'agir, elle ne la trouve que parce que sa famille est en danger. Elle semble d'ailleurs bien peu sûre d'elle et fragile dans les autres situations.

    Bref, je suis assez d'accord avec la conclusion de cette dame. On suit du début à la fin un personnage qui ne prend jamais vraiment la stature d'une héroïne. Elle demeure une personne simple dont seul l'amour maternel décuplera la volonté. Elle est, du début à la fin, écrasée par la personnalité des personnages masculins (même mort c'est dire !).

  • @SPX : comme je te le disais, cette communauté est avant tout basée sur l'échange et la discussion donc ne te sens le besoin de devoir demander la permission avant de lancer un débat ou d'écrire tes idées.

    SPX a écrit :

    En plus, ce sont les Rats qui envoient Mme Brisby se faire sacrifier pour qu’elle aille droguer la pâtée du chat, ce qui la mène directement en cage.

    Heu non c'est faux, c'est elle qui se porte volontaire. Justin est d'ailleurs contre cette idée.

    SPX a écrit :

    c’est le grand frère qui est courageux, prend des initiatives quand la maison menace de sombrer, alors que les deux filles ne font qu’appeler leur maman à l’aide.

    Et bien moi je ne trouves pas ça particulièrement choquant, je dirais même que c'est la réaction que j'attendais. Je veux dire on parle d'enfants ici et quelle est la réaction primaire d'un enfant face à un grave danger ? Appeler sa maman à l'aide. Martin en impose plus parce que dès sa scène d'introduction on sait qu'il veut être le super-héros qui sauve tout le monde mais prêtez attention au fond sonore lorsque le parpaing s'enfonce et vous l'entendrez aussi appeler à l'aide tout pareil, bien que ce ne soit pas montré.

    SPX a écrit :

    Vraiment, il n’y a que les hommes qui ont le beau rôle.

    Je ne sais pas si c'est vraiment ce terme "beau rôle" que la dame a employé mais si on prend un peu de recul sur qui fait quoi dans ce film. Qui est-ce qui doit suer sang et eau pour sauver sa famille ? Qui est-ce qui doit affronter le chat Dragon, le hibou mangeur de souris, le tracteur, le rosier, le vide, Jenner et les sables mouvants pour finir les mains brûlées ? Certainement pas un personnage masculin...

    Du coup en ce qui concerne ces derniers : le Grand Hibou ? C'est la mort incarné qui prodigue de cryptiques bons conseils... Nicodémus ? Il impressionne mais son autorité est contestée, de plus il finit sous un parpaing... M. Ages a peut-être la science mais il n'en reste pas moins un vieux bougon de première... Jeremy ? C'est le benêt de service... Justin ? Oui, Justin en impose mais au final sa seule scène importante c'est lorsqu'il renverse Jenner et prend la suite de Nicodémus et après ça disparut... Jonathan ? Jonathan est une présence qui accompagne Madame Brisby où qu'elle aille mais au final c'est elle qui agit et qui reprend le manteau de son défunt mari et sauve à nouveau les rats de NIMH.

    En fait je suis d'accord pour dire que ce manque de personnages féminins forme une vision des différentes société à dominance masculine mais pour moi ça reste beaucoup trop dans le fond pour être vraiment perçu comme une volonté d'imposer un machisme sur l’œuvre. Par ailleurs si un ou plusieurs autres personnages féminins forts avaient fait leur apparition je pense que cela aurait fait de l'ombre à Mme Brisby car après tout c'est bien elle le héros de cette histoire et personne d'autre.

    Moi j'ai l'impression que ces détails semblent obscurcir quel était le message de ce film à savoir le même que celui de Tolkien à savoir qu'on a pas besoin d'être grand et fort (ou ici un mâle) pour accomplir de grandes choses. En reprenant la même logique on pourrait dire que l’œuvre de Tolkien est irrespectueuse des personnes de petites tailles parce qu'ils ne font pas partie des classes dominantes de la Terre du Milieu. Pourtant, bien que cela soit vrai, personne ne semble le ressentir comme ça parce que cela n'avait aucun intérêt pour l'histoire de développer cet aspect.

  • Hé, c'est que c'est pas mal du tout, tout ça !

    Bon, je vous rassure, même si je ne le fais pas de suite, je donnerai vraiment mon avis. Mais je vais attendre encore deux ou trois jours, histoire de laisser s'exprimer d'autres personnes qui en auraient envie. Non pas que je veux absolument avoir le dernier mot et être sûr que plus personne n'argumente après moi, mais vos réactions pourraient me donner - d'ailleurs, ç'a déjà été fait - des pistes supplémentaires. Donc, je m'engage à vous livrer ma réponse d'ici deux-trois jours. Continuez à donner vos arguments.

  • Allez, chose promise, chose due, voici donc mon avis.

    Deux choses importantes :

    - je vais faire pas mal de spoils, il y en a trop pour que je puisse passer à côté.

    - continuez à réagir si vous le voulez, et n'hésitez pas non plus à alimenter le forum sur Fievel

    Pour couper court à tout suspense, je vais répondre directement à la question "Alors, Mme Brisby est-elle un personnage placé sous le signe du sexisme antiféministe ?" par un seul mot :

    NON

    Définitivement pas.

    Voici maintenant mon argumentation :

    Les œuvres culturelles, même celles destinées au jeune public, sont souvent chargées de messages, pas forcément très flatteurs pour certains. Ainsi, des ligues de défense de la morale américaines ont fustigé le Roi Lion, parce que ce film d’animation présente une société de lions où l’on a un seul lion pour qui une douzaine de lionnes va chasser, alors que lui ne fait rien. Évidemment, dans notre société occidentale, un tel comportement choque. Mais il ne faut pas oublier que c’est ainsi que fonctionne la société des lions : un mâle dominant, des femelles soumises, et c’est tout.

    D’autres éléments plus proches de nous peuvent paraître sexistes. Je ne suis pas le dernier à penser que la plupart des princesses des contes de fée, repris ou non par Disney, donnent des images de la condition féminine plutôt dégradantes. Cendrillon encaisse les humiliations et les coups de sa belle-famille sans oser se défendre, ni même protester ou penser à protester. Et la Blanche-Neige de Disney est vraiment naïve et soumise aux clichés les plus machistes. Après une fuite éperdue dans une forêt effrayante, la jeune fille se retrouve dans la maison des sept Nains. En voyant l’état dans lequel est la maison, son premier réflexe est de faire le ménage, en chantant !

    Je lui demande alors de préciser. S’ensuit l’échange que je vais tâcher de restituer de mémoire sous la forme « observation de la dame, puis réponse de ma part », la plupart des réponses seront bien entendu approfondies avec le recul.

    On voit rapidement que tous les personnages ayant un tant soit peu de pouvoir sont des hommes. Aucune femme ne dirige. Ce jusqu’au sein de la famille : il n’y a plus d’homme adulte, mais sur les quatre enfants, si on ne compte pas le petit dernier qui est malade, c’est le grand frère qui est courageux, prend des initiatives quand la maison menace de sombrer, alors que les deux filles ne font qu’appeler leur maman à l’aide.

    Avant toute chose, remettons les choses dans leur contexte : Robert C. O’Brien a écrit le livre en 1973. En admettant qu’il ait été élevé dans une famille de catholiques Irlandais, j’imagine que sa conception de la famille était du type « bonne famille chrétienne » et tout ce qui s’ensuit : le père au travail, la mère au foyer qui s’occupe des enfants. Le fait que Mme Brisby soit jeune veuve est une rupture du modèle familial conventionnel. Le film date de 1982, à cette époque, la révolution sexuelle n’était pas encore chose acquise (et l’est-elle encore trente ans plus tard alors que de trop nombreuses inégalités hommes/femmes ont la vie dure ?). Voir une femme élever seule ses enfants et travailler pour ça était quelque chose de peu répandu, et pas forcément très bien considéré.

    Le fils aîné, Martin, a une réaction compréhensible : son père n’étant plus là, c’est maintenant lui l’homme de la maison. On imagine facilement que cette hardiesse n’est qu’une carapace pour dissimuler ses émotions. Il a récemment perdu son père et a peur de voir son petit frère disparaître à son tour ; aussi n’hésite-t-il pas à jouer les gros durs, et à se montrer insolent pour contenir son chagrin et sa crainte. Ce qui ne l’empêche pas de regretter rapidement d’avoir contrarié la Musaraigne, et de demander pardon à sa mère.

    Vraiment, il n’y a que les hommes qui ont le beau rôle. Le Grand Hibou détient la sagesse, les Rats sont menés par Nicodémus, M. Ages est un docteur. Le corbeau s’impose aussi, même s’il est contrebalancé à 50/50 par la Tatie Musaraigne.

    Là, encore, c’est une question de contexte. Si l’on prend encore en compte le fait que cette histoire se passe dans années 1970 (voire même plus tôt, si ça se trouve, l’histoire se situe plutôt dans les années 1950-1960, si Robert C. O’Brien a voulu retrouver la campagne de sa jeunesse), les professions médicales, scientifiques, universitaires et politiques étaient l’apanage de la gent masculine – cela ne veut pas dire qu’il n’y avait pas de femmes médecins ou dirigeantes, mais elles étaient bien moins nombreuses. Ce n’est pas du machisme, mais une « peinture » de la réalité d’alors. Et puis, est-ce que ces nombreux hommes ont un aussi « beau rôle » que ça ?

    Même s’il détient la sagesse, le Grand Hibou est avant tout un personnage vraiment méchant, le premier que croise Mme Brisby. Que ce soit dans le livre ou dans le film, sa seule présence est à elle seule synonyme de danger pour la mère Souris. Les hiboux mangent les souris, aussi la pauvrette sait pertinemment qu’elle va se jeter dans la gueule du lion en allant lui demander conseil. Et pourtant, elle y va, et ne s’enfuit pas à toute allure quand elle se trouve devant lui, ce qui est plutôt tentant quand on voit ce que Don Bluth a fait de cet être teinté de mystère inquiétant : un véritable monstre, vivant dans un chêne noirâtre aux branches noueuses, rempli d’ossements et de toiles d’araignée. Lui-même est immense, ses os craquent quand il fait un mouvement un peu brusque, ses ailes sont couvertes de toile d’araignée, sa voix est tonitruante et ses yeux émettent une lumière glauque, et renvoient l’image de son interlocuteur tels deux miroirs. Sans attendre la fin de la question de Mme Brisby, le Hibou l’envoie paître. C’est en entendant le nom de Jonathan que la situation bascule : surpris, le Hibou invite Mme Brisby à trouver de l’aide auprès des Rats. Victoire incontestable de la petite souris sur le Grand Hibou.

    Je reviendrai tantôt sur Nicodémus et la société des Rats, mais je peux m’attarder sur M. Ages. Au premier abord, ce personnage n’est vraiment pas sympathique. Plus préoccupé par ses recherches que le bien-être de ses semblables, c’est d’un ton fort peu compatissant qu’il fait ses condoléances à la jeune veuve. Un spectateur averti remarquera d’ailleurs un petit indice comme quoi ce scientifique cache quelque chose : pendant un plan d’une seconde sur une lampe à pétrole qui s’allume, il y a un livre en arrière-plan sur lequel on peut lire « N.I.M.H. » et « Le Plan ». Depuis le début, ce « drôle de bonhomme » est impliqué dans le secret.

    Jérémie, le corbeau en mal d’amour, paraît effectivement sexiste : dès sa première apparition, on comprend que c’est un dragueur invétéré, qui séduit toutes les filles qu’il croise, et il ne perd pas une occasion de faire le malin devant Mme Brisby pour l’impressionner. Il émet des généralités du genre « les filles admirent les hommes athlétiques », « les filles adorent les gars que les enfants aiment », « les filles raffolent des bijoux ». Il finit par devenir vraiment agaçant, même pervers, lorsqu’il réclame à Mme Brisby son médaillon, alors qu’il est pratiquement allongé sur elle – une attitude choquante, surtout dans un dessin animé pour enfants. Mais les spectateurs ne sont pas dupes, ce personnage n’est jamais pris au sérieux, car chaque tentative de briller de sa part tourne rapidement au ridicule, et le public rit de sa maladresse chronique alors que Mme Brisby le repousse fermement et l’envoie se rendre utile ailleurs.

    Tatie Musaraigne est une femme de caractère. Autoritaire, arrogante par moments, elle est un personnage féminin plutôt fort, même si on ne la voit pas beaucoup. C’est elle qui a le culot d’accompagner Mme Brisby sur le tracteur après avoir mis les enfants de celle-ci à l’abri, et qui parvient à saboter le carburateur, laissant un répit d’une journée à la maisonnette familiale. C’est elle qui conseille à Brisby d’aller voir le Hibou. Et c’est elle qui veille sur les enfants lorsque Mme Brisby part chez les Rats, puis pendant le déplacement de la maison. Elle ne fait aucun compromis lorsque Jérémie se rend chez les Brisby ; elle l’attache et le bâillonne pour couper court à ses bavardages. Et chaque fois qu’elle parle des Rats, c’est pour les insulter et promettre de les renvoyer par la force s’ils viendraient à approcher la maison. Et si Don Bluth la fait sursauter de frayeur quand elle entend les Rats installer leurs cordages autour de la maison, Robert C. O’Brien la présente comme autrement plus combative. Voici un petit échange entre la Musaraigne et les Rats venus pour le déménagement :

    (p198-199)

    -         Mais, dit Mme Frisby à Justin. C’est la Musaraigne !

    -         Oui, répondit Justin. Une Musaraigne bien acariâtre.

    L’un des rats parlait. Mme Frisby reconnut Arthur.

    -         Mais je vous dis, m’dame, que nous avons la permission de Mme Frisby. Elle veut que nous bougions sa maison. Demandez à ses enfants. Appelez-les.

    -         Ne me dites rien ! Qu’avez-vous fait de Mme Frisby ? C’est une bonne chose que les enfants ne vous aient pas entendu. Ils seraient morts de peur ! Si Mme Frisby voulait que vous bougiez sa maison, elle serait là !

    -         Tout va bien, appela Mme Brisby en approchant. Je suis là.

    -         Mme Frisby ! s’écria la Musaraigne. Juste à temps ! J’ai entendu un bruit, je suis allée voir et j’ai trouvé ces – créatures – qui essayaient de déterrer votre maison.

    Une musaraigne qui tient tête à une bande de rats ne doit pas manquer de ressources.

    La société des Rats est pareillement exclusivement masculine. En plus, ce sont les Rats qui envoient Mme Brisby se faire sacrifier pour qu’elle aille droguer la pâtée du chat, ce qui la mène directement en cage.

    Dans l’œuvre originale de Robert C. O’Brien, on voit plus en détail la société des Rats. Avant que Mme Frisby ne soit présentée à Nicodémus, on la fait patienter dans la bibliothèque. Là, elle rencontre Isabella, une jeune Rate chargée de la comptabilité des denrées collectées par les Rats, qu’elle tient soigneusement à jour sur ses nombreuses feuilles de compte. Les deux femmes sympathisent vite. Mme Frisby apprend qu’il y a d’autres Rates qui s’occupent de faire fonctionner la base des Rats pendant que ces messieurs sont à un meeting. Néanmoins, Mme Frisby comprend que « les femelles se rendaient parfois aux meetings et d’autres fois, non ». (p83-84) Les femmes ont bel et bien leur place dans la société des Rats, et pas seulement dans les tâches ménagères. Dans le film d’animation, M. Ages conduit Mme Brisby à la bibliothèque avant de l’emmener devant Nicodémus, malheureusement, cette scène de rencontre avec Isabella n’a pas été tournée, et il est vrai qu’on ne voit aucune fille Rat. En même temps, on ne voit que des guerriers, des ouvriers ou des politiciens, l’idée du contexte de professions masculines s’impose encore.

    Pour ce qui est du sacrifice, je ne le vois pas sous cet angle. Un sacrifice, c’est une perte délibérée au profit de quelque chose. Or, si Mme Brisby prend un grand risque en allant mettre la poudre soporifique dans la gamelle de Dragon, il subsiste une bonne chance pour qu’elle en réchappe – dans le cas contraire, jamais les Rats ne l’auraient laissé faire. Ensuite, ce n’est pas un sacrifice, mais un volontariat. Consciente du danger qu’implique une telle expédition, la petite souris dit clairement « je suis volontaire », et bien que Justin s’y oppose immédiatement, elle insiste. Dans la version animée, Nicodémus se contente de lui donner sa bénédiction, car il a compris implicitement ce qu’elle voulait faire. Dans le livre, elle prend un petit moment pour se justifier :

    (p91)

    -         Vous oubliez que je suis la mère de Timothée. Si vous, et Arthur, et tous les autres membres de votre groupe pouvez prendre des risques pour le sauver, alors je peux en prendre aussi. Et réfléchissez à ceci : je ne veux qu’aucun de vous soit blessé – peut-être même tué – par Dragon. Mais plus encore, je ne veux pas que cette tentative échoue. Peut-être que le pire qui puisse vous arriver, avec de la chance, est d’être obligés de vous disperser et fuir, et laisser ma maison en plan. Mais alors, qu’est-ce qui nous arrivera ? Timmy mourra, pour sûr. Alors si personne d’autre ne peut endormir le chat, je dois le faire.

    Mme Brisby va donc risquer délibérément sa vie pour contribuer à protéger celles de ses enfants. Nous savons que c’est en mettant la poudre dans la nourriture du chat que Jonathan a été tué. Elle va réussir là où feu son mari a échoué, et ce alors qu’elle n’a pas été soumise aux expériences des scientifiques. Techniquement, elle est donc moins intelligente, moins forte, et pourtant elle y parvient. Certes, elle se fait prendre par l’un des enfants du fermier, mais cette complication va être salutaire. Pendant sa captivité, elle apprend que les scientifiques de N.I.M.H. vont raser le rosier des Rats dès le lendemain matin. Elle préviendra les Rats qui pourront disparaître à temps.

    Enfin, et cela me paraît être le plus important, c’est ce qu’apporte Mme Brisby à cette société des Rats. Dans le film d’animation, elle ne leur permet pas seulement d’échapper aux scientifiques comme le fit son défunt mari quatre ans plus tôt, mais elle révèle aussi les lacunes de cette société soi-disant « idéale », qui a emprunté à celle des Hommes les bons côtés, et les mauvais. Ces Rats si intelligents, si malins, et si avancés sont également paranoïaques, fourbes, réactionnaires, voire même totalement monstrueux.

    C’est l’une des principales différences entre le livre et le film : dans le roman, il y a déjà eu scission entre les opportunistes qui veulent tirer parti de tout ce qu’ils trouvent chez les Humains, et les progressistes qui préfèrent fonder leur propre société qui pourrait subvenir à ses besoins sans voler. On apprend que Jenner est parti, emmenant avec lui un groupe de dissidents dont on entendra seulement parler. Dans le film, en entendant tonner Jenner contre l’ « utopie du Plan », la pauvre Mme Brisby comprend vite qu’elle a débarqué dans un sacré sac de nœuds. Et c’est sa présence qui va accélérer les choses. Les conflits fermentaient depuis longtemps, et Jenner profite de l’opération de déplacement de la maison pour mettre à exécution son plan à lui, et afficher au grand jour la personnalité machiavélique qu’on lui soupçonnait déjà. La scission est alors consommée. Elle est douloureuse, car elle provoque trois morts violentes – Nicodémus, Jenner et son lieutenant – mais ce mal permet à la société des Rats d’aller de l’avant, le dernier obstacle à l’exécution du Plan des Rats ayant disparu.

    Voilà donc ce qu’il advient de cette société qu’on pourrait trouver « machiste ». Une petite souris parfaitement ordinaire va se montrer plus « puissante » que des Rats génétiquement modifiés en renversant la situation à son avantage, et au leur. Et c’est la conclusion de cette histoire : grâce au miracle de la magie du bijou de Jonathan, Mme Brisby va réussir à elle seule à déplacer sa maison, alors que tout semblait perdu. Là encore, il s’agit d’une licence poétique de Bluth : le courage dont elle a fait preuve tout du long du film est représenté symboliquement. À défaut de soulever des montagnes, sa foi soulève le parpaing. Elle s’affranchit ainsi de l’ombre de son défunt mari, qui jusque alors était le seul vrai héros des Rats, et le surpasse. El la voilà, rayonnante comme un soleil, brandissant le médaillon devant tout un parterre de Rats qui adoptent tous une pose de soumission, genou à terre et tête baissée. Il est fort probable qu’ils en auraient fait leur reine, si telle avait été sa volonté.

    J’ai recueilli d’autres avis de personnes qui pensaient qu’après toutes ces émotions, une idylle allait naître entre Mme Brisby et le jeune premier, le capitaine Justin. Dans le livre comme dans le film, cependant, cela n’arrive pas. Don Bluth a respecté le choix de l’écrivain et a évité de faire une fin trop « conformiste » où les Brisby auraient été une famille reconstituée. En choisissant de rester au champ Fitzgibbons, Mme Brisby prouve qu’elle n’aura pas besoin d’un homme pour faire vivre son foyer. Une fois encore, c’est la réussite d’une femme seule qui garde la tête haute. Et le fait qu’elle ait finalement confié le médaillon à Justin est une dernière preuve de cet affranchissement : après avoir découvert le secret de N.I.M.H., et la manière dont Jonathan y était mêlé, elle a décidé de tourner définitivement la page, et d’aller de l’avant. Elle a laissé partir le dernier souvenir concret qu’elle avait de son mari, qui restera avec les Rats, tandis qu’elle et ses enfants vivront désormais de leur côté.

    Alors, Brisby, souris sexiste ? Chacun est libre de penser ce qu’il veut en voyant ce film – c’est d’ailleurs l’une des caractéristiques d’un bon film, c’est qu’il en découle plusieurs interprétations. On peut trouver du sexisme dans bien des histoires, y compris celles destinées aux enfants. Il peut paraître délibéré, bien que ce ne soit souvent pas le cas. De mon point de vue, Brisby n’a rien de sexiste. Au contraire, les éléments précédemment nommés peuvent être considérés comme tels, mais chacun se voit contré par une réaction, et cet ensemble la place clairement en position de supériorité par rapport à tous les hommes auxquels elle se retrouve confrontée tout au long de cette aventure. C’est avant tout une mère aimante, son amour la pousse à braver la mort de nombreuses fois, révélant une « âme courageuse », pour qui « la pierre se réveille ». Et son triomphe n’est pas seulement une victoire sur la maladie de son fils, c’est un accomplissement personnel par rapport à tous les obstacles auxquels une veuve peut se retrouver confrontée.

    Voilà, j'espère que cette argumentation vous semblera pertinente, à défaut de l'approuver. Je remercie ceux qui se sont exprimés, qui m'ont donné des idées, et ai d'autres idées de chapitres sur Don Bluth en cours (faut que je contacte mon éditeur).

    • Belle démonstration, mais tu fais beaucoup référence au livre. Je ne suis pas à l'aise avec l'idée de confondre deux interprétations d'une oeuvre (ici le livre et le dessin animé) en une seule et même entité.

      Je séparerais donc ton commentaire en "Le dessin animé peut être un peu sexiste, mais le livre d'origine ne l'est pas dans le contexte de son écriture".

    • C'est vrai, il y a pas mal de références au livre, mais d'un autre côté, le film lui est fidèle. Il y a eu des rajouts - tout le côté "magique" avec le médaillon, les scènes haletantes, la vie de famille de Mme Brisby, mais pour moi, ça se complète : le film a le contenu du livre en résumé, quelque part.

      Cela dit, ton observation est intéressante, aussi. Je devrais peut-être effectivement scinder le chapitre en deux parties distinctes, même si je reste sur l'idée que le film est un affranchissement du sexisme, ne serait-ce qu'avec le médaillon que Mme Brisby abandonne.

    • Hier, lancement de l'expo au Méliès de Montreuil, où Brisby sera à l'honneur pour les deux prochaines semaines. Pendant la séance, j'ai remarqué quelque chose qui me donne un argument supplémentaire : on ne les voit pas bien, mais regardez attentivement les gradins pendant le meeting. Vous verrez que, malgré ce que j'ai dit, on voit des Rates avec des robes et des coiffures médiévales. Les femmes ont bien leur place dans la vie politique de cette société.

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