Mener à bien ses projets personnels

Le sujet n'est pas neuf, surtout sur le Refuge, mais je crois que ça va mieux en le disant, surtout en voyant le nombre de projets abandonnés au fil des années.


Mener à bien un projet, surtout personnel, nécessite quelques pré-requis qui ne sont pas forcément évidents au premier abord :

Admettre l'échec de ses projets précédent

Ce point est sans doute celui qui peut débloquer toute la suite. En effet, on traîne tous dans la vie des casseroles, des projets qu'on a entamés et qu'on n'ose pas clore parce qu'on se dit qu'on y reviendra forcément à un moment où un autre.

Foutaises !

Ce genre de projet n'est pas là pour être terminé, mais pour être analysé. Car si vous avez laissé de côté ce ou ces projets, c'est pour une bonne raison, et les déclarer définitivement clos permet de se pencher plus sereinement sur les raisons de leur échec.

Le succès : une route semée d'échecs

Ces raisons peuvent être extérieures bien sûr. Vous avez perdu les sources de votre projet dans un crash disque et vous ne vous voyez pas tout refaire, votre co-équipiers est décédé, soit. Mais à part ces deux exemples extrêmes, l'échec d'un projet tient à vous. Quand vous n'avez pas décidé de vous y remettre parce que bon, flemme.

Cela dit, il n'y a pas de flemmard professionnel. On est juste humain, on préfère faire ce qui nous plaît plutôt que ce qui ne nous plaît pas. Ce qui m'amène logiquement à mon deuxième point.

Découvrir ce qu'on aime faire

Cela paraît peut-être évident au moment de s'engager dans un projet long et chronophage, mais je me suis personnellement rendu compte que ce n'était pas aussi simple. Parce qu'il y a ce que l'on aime faire, et ce qu'on croit que l'on aime faire. La distinction est essentielle et se voit rapidement. Dans le premier cas, on le fera tout naturellement, sans même devoir y penser. Dans le second cas, on va employer des expressions comme :

  • Il faut que je m'y remette
  • Il faut que je me motive
  • Il faudrait que je le fasse

Je ne crois pas mentir en disant qu'on a tous dit au moins une de ces formules au moins une fois dans sa vie. Quand il s'agissait de tâches obligatoires comme des dissertations ou des préparations d'exposés, on le faisait de toute manière, car la peur du zéro était plus forte que la mésenvie de le faire. Quand il s'agit d'un projet personnel qui n'est pas déterminant pour notre avenir, tout de suite ça devient beaucoup plus compliqué. On peut ainsi trouver dans cette catégorie :

  • jouer de la basse
  • repeindre ses volets
  • traduire le livre de jeu de rôle Fallout Pen and Paper en français (j'ai tenté)

Alors oui, c'est extrêmement cool de jouer de la basse, mais à moins d'être passionné, ça ne sert à rien de s'y mettre pour voir parce que c'est juste long et chiant avant d'arriver à quelque chose. Alors oui, les volets sont un peu fades, mais ça ne les empêche pas de vous protéger de la maléfique lueur solaire, donc bon. Et j'avais commencé cette traduction à un moment où je n'avais plus Internet, mais qui trompais-je, c'était pour tuer le temps.

Tout cela pour dire qu'il est important d'identifier les activités dont vous prenez conscience que vous n'avez pas vraiment envie de le faire (notamment par l'analyse de vos projets arrêtés, à quel moment vous êtes-vous arrêtés), ce qui permet de mettre en évidence ce que vous aimez faire. Ce pour quoi vous ne compterez pas votre temps.

Vous allez objecter, et vous avez parfaitement raison, que si dans un projet vous ne faites que ce qui vous botte, il ne va pas aller très loin. Ce qui me permet d'arriver en douceur sur la dernière partie de cet article.

S'entourer

Plus facile à dire qu'à faire, surtout pour les plus asociaux d'entre nous, mais l'évidence est là : une fois qu'on s'est rendu compte qu'on n'allait pas tout faire dans le projet parce que tout ne nous plaît pas, il faut forcément trouver des personnes à qui cela dirait de faire les parties que l'on délaisserait.

Pour cela, pas de secret, il faut rencontrer des gens pour parler de son projet. Pour cela, il y a mille et une façons de faire : participer à des évènements dans le thème de votre projet, s'inscrire à une association ou même tout simplement un forum sur Internet. Quelle que soit l'occasion, il est toujours mieux de parler un petit peu de vous et de vous intéresser aux autres avant de présenter son projet. Question de politesse, mais aussi d'efficacité, votre projet intéressera d'autant plus que vous aurez vous-mêmes intéressé ou que vous vous serez intéressés aux autres.

La présentation en elle-même est laissée à votre appréciation, mais d'une manière générale, il vaut mieux commencer doucement, parler de votre projet de manière générale, et ne rentrer dans les détails pointus que si on vous en fait la demande explicite.

Travailler en équipe

Des gens sont intéressés par votre projet au point de vouloir vous donner un coup de main ? Félicitations ! Mais tout n'est pas encore joué. En effet, il s'agit de personnes qui vont donner de leur temps et de leur énergie pour faire aboutir un projet qui n'est pas le leur. Il convient donc d'une part de leur mâcher le travail autant que possible, et de reconnaître leur apport dans le produit final.

"Travailler ensemble vers un but commun, jusqu'à ce qu'une "différence d'opinion" se termine par une chute dans de la lave"

Pour la première partie, à partir du moment où au moins une personne a accepté de vous filer un coup de main, vous passez de créateur à chef de projet. Ce n'est pas qu'une question de terminologie. Vos tâches qui se cantonnaient jusque là à faire ce que vous aviez envie quand vous en aviez envie se voient agrémentées de nouvelles que vous n'aviez pas forcément prévues au départ, et que vous n'aimerez pas forcément accomplir. Et pourtant, elles sont indispensables à la bonne marche et à la réussite de votre projet. Ces tâches incluent la répartition des tâches du projet, le suivi de l'accomplissement de ces tâches, leur planification dans le temps, la coordination si au moins deux personnes se chargent de la même tâche, etc... Et vous ne pouvez évidemment compter que sur vous-mêmes pour accomplir ces tâches, car il s'agit toujours de votre projet, et personne ne voudra faire ce travail de gestion à votre place.

Pour la seconde partie, c'est plus délicat. Si la mention des contributeurs dans les crédits du projet est simple et évidente, d'autres situations pourront être plus compliquées à gérer. Comment réagir si un de vos zélés contributeurs accomplit une tâche sans atteindre le niveau de qualité que vous en attendiez ? Faut-il garder un travail médiocre pour ne pas froisser la sensibilité de quelqu'un qui a vous effectivement donné de son temps et de sa personne en toute bonne foi ? Chaque situation est différente, mais illustre bien la difficulté de s'entendre sur un niveau de qualité. Mon conseil serait de refuser dès le départ l'aide de quelqu'un dont la qualité du travail que vous comptez lui confier ne correspond pas à ce que vous cherchez. Ça permet d'éviter dès le début des situations gênantes plus tard, une fois que le mal est fait.

Conclusion

Un projet personnel comporte paradoxalement plus de contraintes qu'un projet professionnel, car le temps manque toujours cruellement, on n'est pas compensé (financièrement notamment) pour effectuer les tâches que l'on n'aime pas faire, et si on compte travailler en équipe, cela représente une charge supplémentaire de travail ainsi qu'une incertitude quand à la qualité et la quantité du travail fourni par les contributeurs. J'espère que cet article vous aura fait prendre conscience des écueils les plus classiques sur lesquels je me suis personnellement échoué au moins une fois avant d'en comprendre l'existence.

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6 Commentaires

  • Je pense que c'est une bonne analyse. Même si je n'ai pas forcément cherché consciemment les causes des échecs de mes projets, je les avais néanmoins comprises de façon inconsciente.Et j'aime particulièrement le premier dessin qui veut vraiment tout dire.

    Cependant pour moi le problème se pose différemment, car mes projets, ce sont avant tout des nouvelles à écrire. Et déléguer ça se confond avec le fait de ne plus être auteur sourire

    En fait, mon principal souci c'est de trouver des gens qui lisent et qui critiquent, parce que ça me motive. Ici heureusement je peux compter sur plusieurs personnes smile . Mais IRL c'est une autre paire de manche, d'une part parce que tout le monde n'aime pas la science-fiction, d'autre part parce que critiquer des passages ou ce qui ne leur convient pas, ça les met mal à l'aise devant moi (ou même, certains en sont incapables).

  • Salut Ertaï,

    Comme disait un auteur, "certaines vérités n'ont de sens que durement découverte et non pas inculqués". Avec l'expérience, tes mots prennent aujourd'hui tous leurs sens !

    Par contre chose étrange, je n'ai pas le même sentiment selon le média utilisé. Par exemple, très jeune avec mon frère on a attaqué une collection de timbre. Pendant à peu près 10 ans on a constitué des albums vraiment sympa, avec recherches historiques, géographiques, vignette personnalisé. On ne voulait surtout pas acheter des cahiers "tout fait" ou faut juste coller un timbre neuf dans son cadre, mais exposer des timbres recup un peu partout (même si leurs valeur est nulle). On a commencé par un album, mais quand la collection s'est étoffé il a fallut tout re-classé. Je pense que l'on a du tout refaire une bonne 20aine de fois, avec a chaque fois des améliorations et apprenant de nos erreurs. Certes on était deux, mais c'était tellement passionnant et les timbres ayant une histoire et presque une "âme" que je n'ai jamais rencontrée le sentiment de lassitude ou de "flemme".

    La lassitude et la flemme est apparu avec l'outil informatique. Déjà lorsque je n'avais que l'Amiga 1200, je préférais jouer à Zool2 ou Settlers que de recopier des recettes de cuisine depuis des notes de ma mère, mais faillait bien trouver un moyen de s’exercer au clavier !

    Ensuite avec internet et la découverte des réseaux sociaux (type forum du moins), c'est un fourmillement d'idée continu avec projets des plus simples au plus fou. Par exemple le projet "AmiphoneX", un lanceur léger pour WinUAE ...  Argh !!! Pourtant on était une super équipe motivé, d'ailleurs le projet est arrivé à son terme ... mais sans moi ! Le collègue à la tête du projet était vraiment une crème de gentillesse, mais le lanceur est devenu "Amigame", une infernale usine à gaz (et ça me fait mal de casser du sucre dessus avec tout le temps que j'y ai consacré).

    Puis plus récemment (il y a 2-3 ans) j'avais été contacté pour aider à la rédaction de la "Bible Amiga" de Pix'n'love. Une occasion unique, super projet, à ma porté, fallait juste produire des petits résumés de jeu avec un nombre de cratère limités. Pas de quota, pas de contraintes de temps (ou alors très large), le truc sympa. Cela avait pas mal commencé, la première fournée de tests était torché nickel. Là encore j'ai merdé, avec cette fois pour origine des troubles professionnels persistants qui ont copieusement pourri mes soirées plusieurs mois ... Et après cette épreuve je n'étais plus motivé pour m'y remettre. Heureusement avec Titan à la tête de ce projet cela à également abouti.

    Le plus difficile est d'apprendre à ce connaitre, à ce niveau là je crois que je déteste être engagé dans quelque chose, la liberté est un luxe qui se paie chèrement !

  • Bon article, toutefois je trouve qu'il manque un point que me semble important : la durée du projet.
    Si on commence un truc qui peut être fini en moins d'un an, tout va bien et on ne devrait effectivement jouer qu'avec les choses décrites ici. En revanche, si on se lance dans quelque chose qui ne peut pas être fini en moins de plusieurs années, alors il apparaît un problème supplémentaire, c'est qu'il va y avoir une évolution pendant ce temps là, à la fois de nous même, mais aussi de ce qui nous entoure. Ce qui fait que même si tout a été bien pensé pour aller au succès, il est possible que les évolutions soit si importantes qu'elles le rendent impossible quand même. Par ex la motivation : elle peut être très importante au début, on peut se dire par ex que le projet même s'il est personnel pourra avoir une utilité pro. Sauf que 3 ans plus tard, on a évidemment changé plein de truc au niveau professionnel, et le projet même si on le termine n'aura plus d'intérêt pour cet aspect-là, évaporant toute la motivation qu'il justifiait.
    Mais ce n'est qu'un exemple, il peut arriver que les choses qui ont changé entre le début et la fin soient si fondamentales que le projet ne pourra jamais être terminé parce qu'il a carrément perdu son sens. Sauf qu'on a aucun moyen de le savoir au début, parce que personne ne peut prévoir se propre évolution dans le temps. Donc certes un moyen de limiter ça serait de découper le projet en petits morceaux. Mais ce n'est pas toujours possible.

  • Le point sur le temps est effectivement important, je pense au projet d'Abriko de mettre les unités de Starcraft dans Warcraft III qui a connu une fin ragique quand Starcraft 2 est sorti. Son projet était tout simplement trop ambitieux, malgré son talent personnel.

    Niveau professionnel, on peut prendre comme exempe Duke Nukem Forever, qui a changé de moteur graphique à mesure où de nouveaux voyaient le jour. Au final, ce jeu a été un gouffre financier qui n'a pas eu le succès escompté.

  • Projet personnel : Lire l'article
    Progression : Interrompue
    Analyse : Échec
    Résolution : Retenter de lire l'article

    Bon sang, qu'est-ce que je peux détester lire...  ouf

    EDIT :

    C'était un article sympa. Un peu court, mais sympa.

    Perso, je me retrouve dans ce texte avec mon projet personnel, LDA. La différence, c'est que ce n'est pas vraiment un 'projet personnel' comme apprendre à faire de la guitare. C'est plus un 'projet d'avenir'. Je le fais parce que je suis convaincu qu'un jour, ça pourra me servir.

    Pareil, le projet AG3D, c'est pas vraiment un 'projet personnel' non-plus. Je le fais pour présenter mes aptitudes dans mon dossier pro, et je le fais pour me perfectionner dans mon domaine.

    Au final, pour LDA comme pour AG3D, je suis passé par de nombreuses étapes ou versions. Je passe d'une étape/version à une autre quand j'estime qu'il faut faire table-rase, ou quand j'y suis forcé. Je ne pense pas qu'il soit juste de dire que je passe d'un 'échec' à un autre à chaque fois.

    Par exemple, je suis passé du forum LDA et de l'idée de faire un RPG-A à la réalisation d'un espèce de wiki parce que j'estimais que j'allais complètement dans la mauvaise direction (mais honnêtement, le forum LDA était bel et bien un échec). La direction que le projet doit prendre n'est pas définie, mais en attendant, ce que je peux définir, c'est l'univers de mon projet. Le jour où je saurais si je veux faire un livre, un film, un jeu, un porno, normalement, j'aurais mon univers suffisamment avancé pour avoir de bonnes bases de développement.

    À l'opposé, je suis passé de la V2 à la V3 d'AG3D parce qu'un changement obligatoire que j'ai fais à ma liste d'assets 3D m'y forçait (soit je faisais table-rase, soit je devais recommencer la même map à 0 - tu parles d'un choix). Et la V3 est clairement encore un bac à sable que je réalise sans le moindre plan, juste pour tester l'intégration dans l'UDK de mes modèles 3D avec lightmaps.

  • Je rajouterais bien quelques constats personnels à cet article :

    • Ne pas voir trop beau, trop grand, trop fort.

    Pour aller au bout de ses projets personnels, il vaut mieux savoir ménager ses ambitions. Plus c'est simple et court, plus ça a des chances d'être achevé. Il sera toujours temps de complexifier à ce moment là.

    • Savoir se motiver

    Même si on a très envie d'en voir la fin, bosser sur un projet, souvent, c'est chiant. Il faut savoir se pousser au cul, résister à l'appel de l'occupation facile parce que personne ne vous le fera à votre place. L'idée serait peut-être de garder en tête la satisfaction que l'on ressent devant le travail accompli.

    • Diviser et hiérarchiser

    Monter un projet, c'est comme partir en expédition. Le plus important c'est la préparation. Pour éviter de se décourager à mi-parcours, il vaut mieux diviser son objectif principal en plusieurs sous-objectifs. Petits objectifs qu'il faudra également hiérarchiser afin de ne pas trop s'éparpiller.

    • Testez-vous !

    Ce que j'essaye de faire : Avant de me lancer dans une idée, je la note quelque part. Si quelques semaines après, elle me trotte encore dans la tête, je relis ce que j'ai écris dessus. Si j'ai toujours l'impression que ça tient debout alors je me lance.

    • Avoir la foi

    Je ne sais pas vous mais il arrive toujours un moment où le doute survient. "Est-ce vraiment une si bonne idée que ça ?", "Est-ce que ça mènera vraiment à quelque chose ?". Si ces doutes peuvent avoir comme effet d'aiguiller un projet vers une voie plus propice, il ne faut pas que cela soit une voie de garage. Il faut garder la foi et la confiance en ses capacités !

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