De la délinquance virtuelle et de l’impunité

De nombreux vandalismes avaient lieu sur le serveur public Minecraft du Refuge d’Aerie’s Guard avant l'instauration d'une liste blanche. Qu’est-ce qui pousse certains joueurs à démolir les constructions des autres joueurs ?


Après les évènements qui ont poussé à renforcer la modération sur le serveur et à nommer de nouveaux opérateurs, je me suis demandé quelles étaient les motivations des vandales. Certains sont des inconnus, qui viennent et détruisent au hasard. D’autres sont des joueurs connus qui tout d’un coup décident de saccager les constructions des autres joueurs. Les profils sont donc multiples, mais peut-être que les motivations sont les mêmes ?

Oups, je ne savais pas !

Écartons tout de suite l’hypothèse de l’ignorance. Dans Minecraft, aucune construction n’est générée automatiquement, tout est fabriqué par les joueurs qui peuplent le serveur. La destruction d’un bâtiment est donc toujours un acte volontaire.

Mais pourquoi sont-ils si méchants ?

Deuxième piste, la méchanceté intrinsèque. Se peut-il que les vandales soient des génies du mal en puissance qui exerce leur hobby de destruction car ils ne savent pas quoi faire d’autre dans la vie depuis que l’achat d’une base lunaire ou sous-marine est devenu vachement cher, sans parler des revendications syndicales des sbires pour avoir des RTT ? Aussi plaisante que puisse être cette idée, je dois également l’écarter. Je ne crois pas que les hommes soient fondamentalement mauvais. Ni bons d’ailleurs, la loi du Talion n’aurait pas été une avancée dans le règlement de conflit sinon.

Juste pour le plaisir ?

La destruction en elle-même est un plaisir. Qui n’a jamais cassé des branches, joué à Jenga, mis des pétards dans des endroits improbables et/ou dangereux, piétiné des fourmilières ou décapité des poupées me jette la première pierre. Par la destruction se manifeste un sentiment de puissance, de maîtrise sur son environnement. Si je peux casser (ou tuer) quelque chose (ou quelqu’un), je suis supérieur à lui. Mais pour autant tout le monde ne s’amuse pas à tout casser en permanence, ni dans la vraie vie, ni dans Minecraft d’ailleurs. Ça ne peut pas être que ça qui est à l’origine des récentes destructions en série.

Décision… conséquence

Cette retenue IRL et IG peut s’expliquer au moins par la lassitude. Comme toutes les bonnes choses, la destruction a une fin, parce qu’au bout d’un moment, ce n’est plus drôle, c’est juste fastidieux (surtout dans Minecraft). Elle peut s’expliquer également par la conscience des conséquences. Personne sain d’esprit ne brûle volontairement sa maison, car il se retrouverait à la rue. Mais il y a également la peur de la punition qui fait que dans la vraie vie on ne vole pas dans les magasins de peur des vigiles et qu’on ne tue pas n’importe qui à la moindre contrariété par exemple. La perspective de la prison ou de l’amende est un frein suffisant pour empêcher une bonne partie de la population de voler, détruire et tuer. Or, dans Minecraft, cet aspect est par défaut absent sur un serveur public.

Le briquet comme épée, l’impunité comme bouclier

La panoplie standard du vandale

Tant qu’un système simple de règles applicables par une équipe de modérateurs ayant à coeur l’intégrité du monde virtuel n’a pas été mis en place, il y a du vandalisme. Parce qu’il n’est pas possible de faire justice soi-même, la mort n’ayant aucune conséquence pour qui ne possède rien. Du coup, détruire une construction ne présente aucun risque pour le vandale, à part subir une avalanche d’insultes qui peut dans certains cas augmenter le plaisir du vandalisme.

Encore pire, si dans la précipitation de l’ouverture d’un serveur public des opérateurs sont arbitrairement nommés sans considération pour la volonté des-dits opérateurs de vouloir préserver l’univers virtuel, certains joueurs peuvent même profiter de leur accointance avec un opérateur laxiste. Ils peuvent alors menacer de faire intervenir ledit opérateur en leur faveur pour éviter toute représailles. Tout est bon pour s’assurer l’impunité pour ses exactions, et puis après tout, ce n’est qu’un jeu, non ?

Juste un jeu ?

Ce qui me gêne quand même c’est l’absence de considération des vandales pour l’aspect psychologiques des joueurs vandalisés. Car même si on est sur internet dans un monde virtuel, il ne faut pas oublier que ce sont des vrais gens qui ont passé du vrai temps à bâtir leurs (fausses) constructions, et les émotions de déception, de colère et de tristesse sont elles bien réelles. Là encore, je crois que les vandales cherchent l’impunité, cette fois-ci morale, en se retranchant sans doute derrière cette utile barricade qu’est Internet et l’anonymat. Quoique tu fasses, même si tu es banni, tu peux toujours trouver un autre endroit à saccager.

Ce phénomène appelé “troll” existait bien avant Minecraft, mais il a trouvé là un terrain de jeu idéal où il peut s’exercer pleinement. Et contrairement à ce qu’on pourrait naïvement penser, le fait que ce soit un univers virtuel rend finalement encore plus impératif l’établissement et la mise en application de règles souvent plus restrictives que les vraies lois du monde réel…

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